La garantie de parfait achĂšvement
CrĂ©ation de la loi du 4 janvier 1978 dite loi « SPINETTA », la garantie de parfait achĂšvement prĂ©vue par lâarticle 1792-6 alinĂ©a 2 et suivants du code civil est la consĂ©quence de la suppression de la rĂ©ception provisoire qui prĂ©existait avant la refonte du rĂ©gime de responsabilitĂ© des constructeurs.
But de la garantie.
La garantie de parfait achĂšvement concerne la rĂ©paration des dĂ©sordres qui ont fait lâobjet, soit de rĂ©serves de la part du maĂźtre de lâouvrage (le client) lors de lâĂ©tablissement du procĂšs verbal de rĂ©ception des travaux, soit dâune notification Ă©crite dans un dĂ©lai dĂ©terminĂ©.
Qui est tenu à la garantie et pendant quelle durée ?
La garantie de parfait achĂšvement nâest due que par lâentrepreneur et ce pendant une durĂ©e dâun an Ă compter de la rĂ©ception des travaux.
Est-il possible dây dĂ©roger ?
Avant le 1er dĂ©cembre 1991, date dâentrĂ©e en vigueur de la loi n° 90-1129 du 19 dĂ©cembre 1990 relative au contrat de construction de maison individuelle, il Ă©tait possible de prĂ©voir contractuellement une durĂ©e infĂ©rieure (ex : un mois) cette disposition nâĂ©tant pas dâordre public. Depuis cette date, lâarticle 1792-6 du Code civil prĂ©voyant la garantie de parfait achĂšvement figure dĂ©sormais parmi les textes auxquels il ne peut ĂȘtre dĂ©rogĂ©, la durĂ©e de garantie ne peut ĂȘtre infĂ©rieure Ă un an.
Quels sont les défauts couverts par la garantie ?
Les dĂ©sordres rĂ©parĂ©s au titre de la garantie de parfait achĂšvement sont ceux qui ont Ă©tĂ© signalĂ©s par le maĂźtre de lâouvrage et notamment les vices et dĂ©fauts de conformitĂ© apparents qui ont fait lâobjet de rĂ©serves sur le procĂšs verbal de rĂ©ception de travaux.
Un dĂ©faut de conformitĂ© apparent est un dĂ©faut dont le maĂźtre dâouvrage a pu se rendre compte seul, sans le recours dâune personne extĂ©rieure (ex : maĂźtre dâoeuvre). Le caractĂšre apparent doit donc sâapprĂ©cier en fonction des compĂ©tences techniques du maĂźtre dâouvrage selon le corps dâĂ©tat concernĂ©.
La garantie ne sâĂ©tend pas aux travaux nĂ©cessaires pour remĂ©dier aux effets de lâusure normale ou de lâusage de lâouvrage.
Quelle garantie pour les dĂ©sordres ayant fait lâobjet de rĂ©serves Ă la rĂ©ception ?
Les dĂ©sordres faisant lâobjet de rĂ©serves lors de rĂ©ception des travaux sont couverts par la garantie de parfait achĂšvement et non par la garantie dĂ©cennale, sauf en cas dâaggravation des dĂ©sordres.
Exemple : une entreprise rĂ©alise des enduits. Lors de la rĂ©ception, le maĂźtre dâouvrage Ă©met des rĂ©serves Ă propos de lâapparition de fissures. Si les fissures ne sont pas infiltrantes et constituent un dĂ©sordre purement esthĂ©tique, il sera fait application de la garantie de parfait achĂšvement. Par contre, si elles se rĂ©vĂšlent infiltrantes et risquent de rendre lâouvrage impropre Ă sa destination, les conditions sont remplies pour que soit fait application de la garantie dĂ©cennale.
Quelle garantie pour les désordres apparus aprÚs la réception ?
Les dĂ©sordres sont ceux ayant fait lâobjet dâune notification Ă©crite de la part du maĂźtre dâouvrage Ă lâentrepreneur dans lâannĂ©e suivant la date de rĂ©ception des travaux.
Suivant la nature du dĂ©sordre, il pourra ĂȘtre invoquĂ©e la garantie de parfait achĂšvement (ex : dĂ©sordre dâordre esthĂ©tique), la garantie de bon fonctionnement sâil sâagit dâun Ă©lĂ©ment dâĂ©quipement dissociable ou de la garantie dĂ©cennale si les dĂ©sordres sont dâune telle gravitĂ© que lâouvrage risque de ne plus pouvoir ĂȘtre utilisĂ© conformĂ©ment Ă lâusage pour lequel il a Ă©tĂ© prĂ©vu.
DĂ©lais pour agir.
Il ne suffit pas seulement pour le maĂźtre dâouvrage dâĂ©mettre des rĂ©serves lors de la rĂ©ception, il doit apporter la preuve quâil a mis tout en Ćuvre auprĂšs de lâentrepreneur pour que les travaux de reprise soient exĂ©cutĂ©s.
Le simple envoi dâune lettre recommandĂ©e Ă lâentrepreneur ne suffit pas Ă justifier la mise en oeuvre de la garantie de parfait achĂšvement. Le maĂźtre de lâouvrage en cas de carence de lâentrepreneur saisir le tribunal compĂ©tent pour suspendre le dĂ©lai de prescription dâune annĂ©e. Sâil ne le fait pas, il ne pourra pas obtenir rĂ©paration sauf Ă dĂ©montrer la faute de lâentrepreneur et passer ainsi sur le terrain des dommages intermĂ©diaires qui Ă©chappent Ă la prescription dâun an.
Quelles sont les consĂ©quences en terme de prise en charge par lâassurance ?
Les consĂ©quences peuvent ĂȘtre importantes puisque la garantie de parfait achĂšvement relĂšve de la responsabilitĂ© contractuelle et nâest pas couverte par les polices dâassurance, contrairement Ă la responsabilitĂ© dĂ©cennale qui fait lâobjet dâune obligation dâassurance. Les travaux de reprise resteront donc Ă la charge de lâentrepreneur ce qui peut reprĂ©senter un coĂ»t important.
LâexĂ©cution des travaux de reprise.
Il nâexiste pas de rĂšgles prĂ©cises en la matiĂšre. Cependant, il est indispensable de consigner par Ă©crit la liste des travaux qui devront ĂȘtre exĂ©cutĂ©s, les dĂ©lais Ă respecter et une fois ceux-ci rĂ©alisĂ©s faire signer un constat de levĂ©e de rĂ©serves.
En lâabsence dâaccord entre les parties ou en cas de non-respect des dĂ©lais convenus et aprĂšs mise en demeure restĂ©e sans rĂ©ponse, les travaux de rĂ©fection peuvent ĂȘtre effectuĂ©s, aux frais et risques de lâentrepreneur dĂ©faillant.
En cas de refus du client de lever les réserves malgré la réalisation des travaux, il est conseillé de le faire constater judiciairement.
Marchés publics
La garantie de parfait achĂšvement existe aussi dans ce type de marchĂ© et elle est prĂ©vue Ă lâarticle 44-1 du cahier des clauses administratives gĂ©nĂ©rales (CCAG) tel quâil est prĂ©vu par le dĂ©cret du 21 janvier 1976 dans lâattente dâun nouveau CCAG conforme aux dispositions du nouveau code des marchĂ©s publics.
Elle est dâune durĂ©e de 1 an sauf stipulation diffĂ©rente Ă compter de la rĂ©ception de travaux ou de 6 mois Ă compter de cette date si le marchĂ© ne concerne que des travaux dâentretien ou des terrassements.
Dans le cadre des marchĂ©s publics, lâobligation de parfait achĂšvement est beaucoup plus prĂ©cise puisque lâentrepreneur doit :
â exĂ©cuter les travaux et prestations Ă©ventuels de finition ou de reprise objet des rĂ©serves figurant sur le procĂšs verbal de rĂ©ception des travaux ;
â remĂ©dier Ă tous les dĂ©sordres signalĂ©s par le maĂźtre de lâouvrage ou le maĂźtre dâĆuvre, de telle sorte que lâouvrage soit conforme Ă lâĂ©tat oĂč il Ă©tait lors de la rĂ©ception ou aprĂšs correction des imperfections constatĂ©es lors de celle-ci ;
â procĂ©der, le cas Ă©chĂ©ant, aux travaux confortatifs ou modificatifs dont la nĂ©cessitĂ© serait apparue Ă lâissue des Ă©preuves effectuĂ©es conformĂ©ment au CCAP ;
â remettre au maĂźtre dâĆuvre les plans des ouvrages conformes Ă lâexĂ©cution.
Conclusion
TrĂšs souvent ignorĂ©e car totalement Ă©clipsĂ©e par la garantie dĂ©cennale, la garantie de parfait dâachĂšvement nâen demeure pas moins lâune des spĂ©cificitĂ©s du rĂ©gime de responsabilitĂ© des constructeurs dâouvrage de BĂątiment.
Elle constitue une sorte de « service aprĂšs-vente » dâune durĂ©e dâun an pour les dĂ©sordres dont la gravitĂ© ne remet pas en cause la pĂ©rennitĂ© de lâouvrage.
Cependant, mĂȘme si ces dĂ©sordres sont de faible importance et souvent de nature esthĂ©tique, ils peuvent avoir de lourdes consĂ©quences pour lâentrepreneur.
Si un vice cachĂ© affecte vos travaux aprĂšs leur rĂ©ception par votre client, vous ĂȘtes tenu de trois garanties : parfait achĂšvement (un an), bon fonctionnement (deux ans), dĂ©cennale (dix ans).
La réception est donc une étape essentielle !
Il est primordial de faire signer au client un procÚs-verbal de réception. Avant de faire jouer vos garanties, votre assureur décennal vous demandera toujours de justifier de la réception de vos travaux par le client.
Pour engager la responsabilitĂ© dĂ©cennale dâune entreprise, le dommage doit soit porter atteinte Ă la soliditĂ© de lâouvrage, soit le rendre impropre Ă sa destination. La soliditĂ© peut ĂȘtre constatĂ©e de maniĂšre objective par une expertise. LâimpropriĂ©tĂ© Ă destination est une notion plus subjective qui dĂ©pend chaque fois des circonstances.
Que faire pour s’exonĂ©rer de sa responsabilitĂ© dĂ©cennale ?
La loi prévoit trois possibilités, mais elles sont rarement retenues par les tribunaux.
1. La force majeure : câest-Ă -dire la survenance dâun Ă©vĂ©nement extĂ©rieur Ă lâentreprise quâil lui Ă©tait impossible de prĂ©voir (une tempĂȘte nâest pas un cas de force majeure, ni mĂȘme la sĂ©cheresse, pas plus quâune crue centennale).
2. Le fait dâun tiers (destruction du bĂątiment par un incendie criminel, par exemple).
3. La faute du maĂźtre dâouvrage : Plusieurs conditions doivent ĂȘtre rĂ©unies par lâentreprise. Il lui faudra prouver que le maĂźtre dâouvrage est compĂ©tent en matiĂšre de construction et quâil sâest immiscĂ© fautivement dans la construction. Autant dire que le cas est rare.
Ne négligez pas les réserves !
Si vous estimez que le client veut vous imposer une solution technique dangereuse, ou sâil refuse le temps de sĂ©chage de vos travaux… vous devez lâinformer du risque quâil prend en Ă©mettant des rĂ©serves.
Pour ĂȘtre retenues, les rĂ©serves doivent comporter quatre Ă©lĂ©ments :
- Indiquer pour quelle raison la solution retenue ou les travaux sont inadaptés
- Quelles en seraient les conséquences (décrire le sinistre probable)
- Proposer la solution technique alternative adaptée, la plus proche de ses attentes (la décrire)
- Indiquer le coût.
Faites les par écrit et pensez à en garder la preuve (lettre recommandée avec accusé de réception).
Câest un sujet qui revient souvent dans lâabondante jurisprudence sur les litiges liĂ©s Ă la responsabilitĂ© dĂ©cennale : lâinadĂ©quation entre activitĂ© rĂ©alisĂ©e par le constructeur et activitĂ© effectivement garantie par lâassureur.
Comme toute assurance, lâassurance de responsabilitĂ© dĂ©cennale coĂ»te cher et nĂ©cessite une procĂ©dure dont lâentrepreneur se passerait bien. Dâautant plus que de trĂšs nombreuses annĂ©es peuvent sâĂ©couler avant dâavoir besoin de faire appel Ă son assureur pour un sinistre de nature dĂ©cennale. Lâimpression de perte dâargent et de temps conduit ainsi parfois lâassurĂ© Ă ne plus contrĂŽler les conditions de son contrat et sa concordance avec son mĂ©tier. Et ce malgrĂ© les relances de lâassureur Ă chaque Ă©chĂ©ance annuelle.
Grave erreur ! Une activitĂ© non dĂ©clarĂ©e au contrat nâest tout simplement pas couverte. Câest Ă dire quâen cas de sinistre, lâassureur ne prendra en charge aucun frais de rĂ©paration des dommages rĂ©clamĂ©s par le propriĂ©taire de lâouvrage. Les dommages de nature dĂ©cennale Ă©tant toujours dâune certaine gravitĂ©, le risque est donc grand de mettre en difficultĂ© toute lâĂ©conomie de son entreprise pour un seul sinistre.
Notre préconisation : vérifier chaque année les activités déclarées
Pour ĂȘtre sĂ»r que le contrat dâassurance couvre bien toutes les activitĂ©s rĂ©alisĂ©es, il est donc fortement conseillĂ© de contrĂŽler Ă chaque Ă©chĂ©ance annuelle les diffĂ©rentes activitĂ©s assurĂ©es. Ces activitĂ©s sont normalement indiquĂ©es sur lâavis dâĂ©chĂ©ance envoyĂ© obligatoirement par lâassureur au moins deux mois avant la date dâĂ©chĂ©ance. Elles comprennent les techniques et procĂ©dĂ©s de construction que lâartisan peut utiliser pour rĂ©aliser son ouvrage. A contrario, si une technique utilisĂ©e par lâartisan nâest pas indiquĂ©e sur ce document ou sur les conditions particuliĂšres du contrat, il y a de fortes chances quâelle ne soit pas couverte. Câest notamment le cas pour les procĂ©dĂ©s techniques novateurs qui nâont pas encore Ă©tĂ© « Ă©valuĂ©s » par les assureurs.
En plus de ce contrĂŽle annuel, il est fondamental de dĂ©clarer en cours dâannĂ©e Ă lâassureur tout nouveau procĂ©dĂ© technique employĂ©. Si ce dernier ne rentre pas dans le cadre des activitĂ©s garanties par le contrat, la signature dâun avenant est nĂ©cessaire, sous peine dâabsence de garantie en cas de sinistre sur un ouvrage rĂ©alisĂ© Ă lâaide ce nouveau procĂ©dĂ© technique.
Un document de contrÎle utile : la nomenclature des activités du BTP
Pour aider les assureurs et entrepreneurs du BTP Ă dĂ©terminer le pĂ©rimĂštre Ă assurer, la FĂ©dĂ©ration Française de lâAssurance publie et met Ă jour rĂ©guliĂšrement la nomenclature des activitĂ©s du BTP. Cette nomenclature, profondĂ©ment rĂ©visĂ©e au printemps 2019, rĂ©pertorie avec prĂ©cision les activitĂ©s pratiquĂ©es par les professionnels du bĂątiment.
Chaque activitĂ© (couverture, plomberie, piscines, photovoltaĂŻque, Ă©tanchĂ©itĂ© de toiture…) est dĂ©taillĂ©e et comprend Ă la fois les travaux de conception et de rĂ©alisation, ainsi que les travaux accessoires inhĂ©rents Ă lâactivitĂ© principale. Exemple : lâactivitĂ© annexe « VRD » est comprise dans lâactivitĂ© principale « travaux de maçonnerie ».
Ă lâaide ce document, lâassureur doit pouvoir dĂ©terminer exactement les activitĂ©s Ă garantir et lâentrepreneur doit pouvoir contrĂŽler si certaines de ses activitĂ©s nâont pas Ă©tĂ© omises par lâassureur.
Attention il n’est pas rare que la compagnie qui vous assure introduise des variantes et ce notamment en incluant des exclusions, voici quelques exemples :
- Maçonnerie, exclusion de la démolition
- Bardage, exclusion du bardage horizontal
- Charpente bois, exclusion des ossatures bois mĂȘme de moins de 20m2, exclusion des traitement curatifs…
- Etanchéité toiture terrasse, limitation de surface, exclusion de la résine
- Carrelage, exclusion des sols coulés ou limitation de surface
- Plomberie-chauffage, exclusion de la maintenance de chaudiĂšres que vous n’avez pas installer
Nous vous conseillons de bien lire la nomenclature des activités associées à votre contrat.