Les nouvelles règles du jeu : acte 1

Après avoir longtemps soutenu de manière dogmatique que la réception tacite « nécessitait la preuve d’une volonté non-équivoque du maître de l’ouvrage de recevoir l’ouvrage », c’est-à-dire en se basant bien souvent sur des critères subjectifs, la Cour de cassation a redéfini les règles en indiquant désormais que : « le paiement de l’intégralité des travaux d’un lot et sa prise de possession par la maître de l’ouvrage valent présomption de réception tacite » (Civ.3ème, 30 janvier 2019, n°18-10.197).

Autrement dit, la réception tacite est désormais déduite par présomption simple, dès lors que le maître d’ouvrage a :

  • Payé l’intégralité des travaux,
  • Pris possession de l’ouvrage.Ainsi, si le maître d’ouvrage (ou tout autre intéressé) prétend qu’il n’y a pas eu de réception tacite, il lui appartient alors d’apporter des éléments de preuve justifiant que l’ouvrage n’était soit pas réceptionnable, soit que le maître d’ouvrage manifestait une opposition caractéristique à la réception de l’ouvrage.Cet arrêt a quelque peu modifié les règles, et au vu de plusieurs auteurs et praticiens, on a pensé que la Cour de cassation allait revenir à sa position plus classique, plus subjective, c’est-à-dire un système sans présomption simple. 

Les nouvelles règles du jeu : acte 2


Or, loin de revenir sur cette solution nouvelle, la Cour de cassation a par un arrêt du 18 avril 2019, apporté deux précisions bienvenues : « la prise de possession de l’ouvrage et le paiement des travaux font présumer la volonté non-équivoque du maître de l’ouvrage de le recevoir avec ou sans réserves ».Ainsi, la Cour de cassation n’exige plus le paiement de l’intégralité des travaux, mais leur seul paiement (ce qui semble indiquer une tolérance, notamment sur la retenue de garantie).
Ensuite, la présomption de réception simple n’exclut pas la possibilité de réceptionner l’ouvrage avec réserves.
Enfin, rien ne semble non plus interdire une réception expresse sur certains lots d’un ouvrage, et une réception tacite sur d’autres lots de ce même ouvrage.

Cette possibilité est solidement établie depuis plusieurs années, avec pour seule limite, l’impossibilité de refuser la réception de certains éléments concernant ce propre lot.

En clair, le système actuel semble permettre une réception tacite de l’ouvrage en entier, ou des lots en entier. 

Des règles nouvelles avec des conséquences nouvelles

Outre les bénéfices significatifs propres à la réception par le maître d’ouvrage, il faut ajouter quelques avantages non négligeables en termes de responsabilité.

En premier lieu, et compte-tenu à la fois des délais pour agir, et du retard qui peut être pris par un maître d’ouvrage pour porter une réclamation, le maître d’œuvre peut espérer échapper au délai d’un an de la garantie de parfait achèvement, ce qui n’est pas négligeable.

On peut espérer bénéficier du même avantage pour la garantie biennale, mais évidemment, le délai étant plus long, il est moins probable qu’il vienne à son terme avant que le maître d’ouvrage ne se manifeste.

En deuxième lieu, s’il est possible de retenir une réception tacite avec réserves, il restera à la charge du maître d’ouvrage de prouver qu’il avait dénoncé ces réserves au moment de la réception.

En troisième lieu, toujours sur le point des réserves, l’appréciation du caractère apparent d’un désordre tendra plutôt vers une appréciation objective de ce qui pouvait (ou devait) être considéré comme apparent au moment de la réception tacite.

Il faut en effet rappeler que les désordres non-dénoncés et apparents sont supposés être acceptés par le maître d’ouvrage. 

Des règles logiques et pertinentes

On peut évidemment s’interroger sur ce nouveau système de présomption de réception, et le trouver très sévère à l’égard du maître d’ouvrage.

Pourtant, il répond à un besoin de logique et de pertinence, dans un monde de plus en plus normé.

En effet, pourquoi devrait-on refuser de reconnaître une réception tacite lorsque le maître d’ouvrage règle le marché et occupe les lieux ? Il est parfaitement logique de retenir une réception tacite et il ne devrait y avoir rien d’autre à prouver, ce serait tout autant fastidieux que superfétatoire.

Ainsi, on pourrait en revenir à l’ancien dicton, et qui est tout à fait adapté ici : « Qui ne dit mot, consent. ». 

L’approche traditionnelle : le cloisonnement

Le principe a longtemps été celui du cloisonnement des responsabilités, entre ce qui était propre à un ouvrage et ce qui ne l’était pas.

On retenait que ne pouvaient relever de la responsabilité décennale que les désordres survenus sur un ouvrage, au cours de la réalisation de cet ouvrage, et non après.

Ainsi, dès qu’on dépassait le cadre de l’opération de réalisation de l’ouvrage, celui-ci devenait un « existant », et les éventuelles interventions postérieures ne pouvaient être qualifiées que de « travaux sur existants », insusceptibles en principe de recevoir eux- mêmes la qualification d’ouvrage.

Ces travaux sur existants étaient considérés comme ne pouvant faire l’objet que de la responsabilité contractuelle : ils n’appartenaient pas à l’opération de construction de l’ouvrage et en étaient distincts.

La Cour de cassation refusait fermement toute tentative d’assimiler ces menus travaux à des cas de responsabilité décennale, et l’expliquait logiquement :

D’une part, de manière très générale, ces menus travaux ne pouvaient pas se voir appliquer une responsabilité décennale puisqu’ils n’intervenaient pas sur un ouvrage, critère et condition sine qua none,

D’autre part, dans les cas où ces travaux impliquaient la pose nouvelle d’éléments d’équipements dissociables, la Cour de cassation considérait qu’il s’agissait d’éléments d’équipement dissociables qui n’étaient qu’adjoints à un ouvrage existant.

Elle l’avait ainsi retenu pour un système de climatisation adjoint à un ouvrage existant (Civ. 3ème, 10 décembre 2003, n°02-12.215) parfaitement dissociable de l’existant, mais aussi pour un revêtement d’isolation (Civ.3ème, 18 janvier 2006, n°04-17.888) appliqué sur de l’existant mais qui en soi, aurait pu être considéré comme indissociable (on retire plus facilement un climatiseur qu’un revêtement d’isolation).

Conséquences pratiques

Concrètement, cette position de la Cour Suprême avait deux impacts majeurs.

D’une part, la prescription était non pas de dix ans à compter de la réception, mais de cinq ans après la fin de la prestation.

La logique voulait en effet que seule la prescription quinquennale pouvait s’appliquer, puisqu’il s’agissait d’une responsabilité contractuelle fondée sur le droit commun.

D’autre part, en matière assurantielle, ces cas de responsabilité étaient rarement couverts et l’obligation assurantielle était moindre.

En effet, puisque cette responsabilité ne pouvait être décennale, l’entrepreneur qui limitait ses interventions à des éléments d’équipements dissociables ou qui ne concevait pas d’ouvrage, n’était plus obligé ni civilement, ni pénalement de souscrire une assurance décennale (qui de toute façon n’aurait jamais eu à s’appliquer).

On pensait la distinction bien établie, mais cette pratique du cloisonnement n’a pas réussi à résister à l’épreuve du temps puisqu’elle a été remise en question par l’évolution de la jurisprudence de ces dernières années.

D’abord, la jurisprudence a retenu une conception très large de la qualification d’ouvrage.

Ainsi, la notion d’ouvrage a été plus facilement retenue lorsque les travaux étaient importants, ou qu’ils étaient d’une envergure particulièrement.

Autrement dit, ce qui n’était pas considéré comme un ouvrage il y a quelques années l’est devenu au fur et à mesure du temps.

C’est pour cela que certains travaux sur existants ont pu être considérés comme un ouvrage propre à part, et donc ouvrir la voie à d’éventuels cas de responsabilité décennale.

Le risque de voir le cloisonnement remis en cause s’est accentué, jusqu’à prendre complètement effet avec une série d’arrêts apparus dès 2017.

La primauté de l’impropriété à destination de l’ouvrage

Par de très nombreux arrêts initiés par l’arrêt Civ.3ème, du 15 juin 2017, n°16-19.640, la Cour de cassation a totalement modifié la donne pour les existants.

La Cour a retenu que : « les désordres affectant des éléments d’équipement, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ».

Ainsi, la Cour de cassation a reconnu qu’un élément d’équipement dissociable de l’existant sur lequel il était installé, pouvait être à l’origine d’une application de la responsabilité décennale s’il entraînait l’impropriété à destination de l’ouvrage en son entier.

En clair, un insert posé sur un existant est-il à l’origine d’un incendie qui détruit l’appartement ? La Cour de cassation retient que l’incendie a rendu l’ouvrage impropre à sa destination et considère qu’il s’agit d’un cas de responsabilité décennale (Civ.3ème, 20 avril 2017, 16-13.603 ; et confirmé récemment par Civ.3ème, 7 mars 2019, n°18-11.741).

Un simple revêtement de sol sur existant d’un lot commercial est affecté de désordres qui le rendent inesthétique ? La Cour de cassation considère que l’atteinte l’esthétisme est aussi une atteinte à la destination de l’ouvrage (Civ.3ème, 29 juin 2017, n°16-16.637).

Le remplacement d’un système de chauffage d’une habitation est établi comme « totalement inadapté » et « aberrant » par un expert judiciaire ? La Cour de cassation considère ici tout à l’inverse que cela ne rend pas l’ouvrage impropre à sa destination, l’inconfort ressenti n’étant pas de nature à rendre les lieux inhabitables (Civ. 21 mars 2019, n°18-12.442).

En fait, là où la Cour de cassation se fondait antérieurement sur des critères objectifs, elle s’est aujourd’hui saisie d’un critère subjectif, celui de l’impropriété à destination de l’ouvrage.

En effet, personne n’est aujourd’hui en mesure de dire ce qu’est ou ce que n’est pas l’impropriété à destination de l’ouvrage : tout dépend de l’appréciation qui en est faite, ce qui introduit un aléa supplémentaire dans chaque dossier ce qui est peu souhaitable.

On peut ainsi y déceler une volonté de la Cour de cassation d’étendre le champ d’application de la responsabilité décennale au nom de l’indemnisation nécessaire des victimes ce qu’une assurance obligatoire permet.

Conséquences assurantielles

La détermination d’une solution assurantielle proposée à un assuré dépend des réponses qu’il apporte à un questionnaire de déclaration du risque.

C’est à l’issue de ce questionnaire de déclaration du risque que l’assureur détermine l’aléa encouru, c’est-à-dire l’éventualité qu’un sinistre se manifeste ou ne se manifeste pas.

Cette étude du risque est réalisé sur la base de travaux statistiques, et sur l’historique de sinistralité de l’assuré, qui permettent de déterminer – fidèlement – l’aléa qu’accepte de prendre en charge l’assureur.

Or, en intégrant ce cas spécifique de responsabilité, on créée une difficulté supplémentaire.

En effet, si le risque n’est apprécié que par le coût des opérations habituelles menées sur les existants, c’est sous-évaluer les conséquences d’une impropriété à destination de tout l’ouvrage né d’un désordre sur cet existant.

A l’inverse, surévaluer par précaution le risque encouru par des travaux sur existants qui peuvent ne pas donner lieu à responsabilité, c’est engendrer une hausse des primes pour l’assuré dont le bénéfice ne serait pas immédiatement perçu.

On peut en définitive comprendre le souhait des magistrats de catégoriser des sinistres non-décennaux en décennaux, pour permettre une meilleure couverture assurantielle, mais c’est au détriment des entrepreneurs mal ou pas assurés, qui risquent d’apprendre à rebours qu’ils auraient dû souscrire une assurance de responsabilité décennale alors que leur corps de métier n’y prédisposait originellement pas.

Par application de l’article 1792 du Code civil, alinéa 1, « tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit (…) des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs, ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. »

Le 2nd alinéa de l’article 1792 dispose qu’une telle responsabilité n’a pas lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère.

Après qu’une maison individuelle ait pris feu, à la suite d’un dysfonctionnement de la chaudière, le constructeur de maison individuelle a été condamné à indemniser le maître de l’ouvrage, par un jugement de première instance, confirmé en appel, au motif que le vice affectant la chaudière, élément d’équipement, n’était pas pour le constructeur de maison individuelle une cause étrangère exonératoire de responsabilité au sens de l’article 1792 du Code civil. C’est ce qu’a confirmé la Cour de Cassation, aux termes d’un Arrêt en date du 29 mai 2019.

Il s’agit de l’application d’une jurisprudence constante, la cause étrangère étant, par définition, un évènement imprévisible, extérieur et « irrésistible » (autrement dit insurmontable). Or, il a pu être jugé, à plusieurs reprises, s’agissant d’un vice de matériau, que nonobstant son caractère imprévisible, celui-ci n’était pas extérieur à l’ouvrage…

En résumé, on retiendra qu’un vice de matériau n’est jamais une cause d’exonération de responsabilité du titre de la garantie décennale. 

Comment éviter les tribunaux

Aujourd’hui, les entreprises doivent aller de plus en plus vite pour rédiger leur devis et pour exécuter leurs travaux. Un certain nombre de moyens sont proposés aux clients pour entraîner à tort ou à raison les entreprises dans la spirale des experts d’assurances ou des tribunaux. En effet, les consommateurs disposent très souvent d’une protection juridique d’assurance, ou appartiennent à un organisme de consommateur. A l’intérieur de ses associations ou de ces services juridiques, des juristes informent directement leurs adhérents et mènent ensemble des actions contre les entreprises. Il est donc nécessaire pour les entreprises de comprendre les mécanismes de l’expertise afin de modifier leur comportement.

Il y a donc plusieurs types d’expertise

1. L’expertise amiable privée (organisée par les plaignants), 2. L’expertise amiable organisée par les assurances,
3. L’expertise judiciaire civile et administrative.

Eviter les pièges et mieux se défendre est vital pour une entreprise de bonne foi. Pourtant, par méconnaissance au regard de ses obligations, elle est très souvent condamnée.

Principe : De l’expertise amiable (privée ou en assurance).

Contrairement à l’expert judiciaire, l’expert amiable est lié par contrat à la partie qui le désigne, ce qui a donné naissance à des controverses, notamment en matière d’assurances (domaine où le recours à l’expertise amiable est le plus fréquent) à propos de la nature de ce lien juridique et des obligations qui en découlent.

Déroulement de l’expertise amiable.
Comme en matière d’expertise judiciaire, la mission de l’expert est limitée à des questions techniques. Les experts consignent leurs constatations, observations et conclusions dans un rapport : l’expertise est close quand les experts ont remis leur rapport aux particuliers qui ont requis leurs avis.

Les règles strictes de l’expertise judiciaire ne sont pas applicables à l’expertise amiable, sauf en ce qui concerne la convocation des parties (NCPC, art. 160) et la présence des experts aux opérations (NCPC, art. 233).

En raison de la convention qui le lie aux parties, l’expert amiable peut voir sa responsabilité contractuelle mise en jeu en cas d’inexécution fautive du contrat.

Hormis cette hypothèse, il répond, en vertu de l’article 1382 du Code civil, aux conséquences des fautes dommageables qu’il commet dans l’exercice de sa mission. Sa responsabilité pénale peut également être engagée.

Principe : De l’expertise judiciaire civile et administrative

L’article 232 du Nouveau Code de procédure civile permet au juge de désigner toute personne de son choix pour l’éclairer sur une question de fait qui requiert les lumières d’un technicien.

Le technicien est un auxiliaire de la justice et non le mandataire des parties : le juge n’est donc pas lié par le choix préalable des parties de telle ou telle personne.

Le technicien ou l’expert qui effectue la mission que lui confie le juge n’exerce pas une profession mais exécute un mandat de justice. Il n’est pas protégé par un statut professionnel : le juge n’est pas tenu de choisir un technicien inscrit sur une liste d’experts.

Pour faciliter le choix du juge, des listes d’experts sont établies chaque année. Il est dressé une liste par la cour d’appel et une liste nationale.

Bien que le juge puisse désigner un expert non inscrit, dans la quasi-totalité des cas, les experts choisis sont ceux qui figurent sur les listes.

L’expertise est contradictoire ou non contradictoire suivant qu’elle est pratiquée en présence de toutes les parties ou d’une seule des parties.

Malgré son caractère technique, l’expertise est par nature un acte judiciaire soumis aux règles qui régissent les procès civils. Pour être opposable aux parties, elle doit donc respecter le principe de la contradiction résultant de l’article 16 du Nouveau Code de procédure civile

Ceci oblige notamment l’expert à :

1. Convoquer les parties à l’expertise,
2. Procéder à la visite des lieux en leurs présences,
3. Mettre les parties à même de présenter leurs observations. 

Il est donc nécessaire pour éviter d’être pris dans l’engrenage de l’expertise (privée ou judiciaire) de bien préparer en amont les pièces de son marché.

Voici en 10 points les pièges à éviter

1. Le devis est un document contractuel qui permet de fixer ce que doit fournir l’entreprise. Il faut donc que ce document soit rédigé avec minutie sans oublier de détailler le prix de l’entreprise et le type de matériaux mis en œuvre. Le fait de détailler son devis peut éviter aux clients de remettre en question le travail réalisé par l’entreprise.

2. Le devis doit faire l’objet d’une attention toute particulière notamment en ce qui concerne les métrés et doit être le reflet exact des travaux à exécuter afin éviter toute contestation de la part du client. Ex : En peinture, les entreprises ont tendance à établir des devis de ravalement de façade « Vide pour plein ». Elles estiment que les tableaux, voussures et appuis en surface développés représentent le vide pour plein de la façade. C’est ce qu’on appelle « les habitudes de travail des entreprises ». Il est préférable dans ce cas de détailler la façade et le travail sur les tableaux, les voussures et les appuis en quatre postes bien distincts. Dans un devis, il est possible de remettre en cause les surfaces mais très rarement les prix sauf en cas d’abus manifeste.

3. Un certain nombre de conditions doivent être également inscrites au devis :

a. Délais d’exécution,
b. Délai de validité de l’offre, c. Mode de règlement,
d. Etc.

4.Pour que l’entreprise prétende au paiement des travaux, le devis doit impérativement être signé par le ou les clients et par l’entreprise et spécifier la mention : « Bon pour Acceptation ou Bon pour Accord ».

5. Lorsque le devis est signé et que les travaux sont engagés, il faut ensuite respecter le planning d’intervention prévu avec le client. Si l’entreprise est contrainte de dépasser le délai prévu, le client doit être prévenu dans les meilleurs délais. Cette précaution évitera bon nombre de conflits.

6. Si le client décide d’agrandir la surface d’intervention de l’entreprise en cours de chantier, il faut absolument que l’entrepreneur rédige, même à main levée, un avenant que devra signer le client pour éviter toute source de contestation lors de l’établissement de la facture finale.

7. Après les travaux, la facture doit être rédigée. C’est une obligation de l’entreprise. Elle doit reprendre l’énoncé du devis et lister les travaux complémentaires réalisés en des termes clairs et compréhensibles par le client. 

8. Lorsque sur un devis l’entrepreneur stipule une marque, un format ou une couleur, il est important de respecter ces engagements. En cas de changement de produit ou de marque demandée par le client en cours de réalisation du chantier, l’entrepreneur doit le stipuler par écrit.

9. A la fin des travaux, il faut établir un procès verbal de réception si possible en même temps que la facture finale. Cette réception génère le point de départ des garanties de parfait achèvement et des garanties décennales.

10. L’entreprise devra avant tout respecter les règles de l’art lors de l’exécution des travaux. En cas de doute sur la réalisation ou la fabrication d’une de ses tâches, elle doit se rapprocher d’un bureau d’étude ou d’un cabinet de professionnels qui devra fournir une réponse écrite.

Malgré tout, si pour différentes raisons le client vous entraîne dans la ronde des experts, il est important de prouver votre bonne foi en fournissant des écrits (devis, factures, réceptions, courriers divers, plannings, etc.).

Pendant l’expertise en assurance ou judiciaire, il est important :

1. D’avoir préparé son dossier,
2. D’être présent,
3. D’être actif dans les discussions,
4. De ne jamais se moquer de l’expert car c’est lui qui va rédiger un rapport,
5. De ne jamais bousculer verbalement l’expert,
6. De ne jamais partir en cours d’opération d’expertise,
7. De vous faire représenter par un avocat maîtrisant le droit de la construction si l’affaire est importante (ils sont peu nombreux, il faut alors faire attention au choix),
8. De se faire représenter par un autre expert si l’entreprise ne se sent pas de taille à affronter un expert.

Important pour conclure

Aujourd’hui, il y a plusieurs types d’experts : privés, d’assurances et judiciaires. Quand l’entreprise de bâtiment souhaite se faire représenter, il est important qu’elle choisisse un expert qui soit absolument neutre par rapport au système des assurances. Dans le cadre d’une expertise judiciaire, il faudra aussi s’assurer du fait que l’expert ne réalise pas d’expertise en assurance. Si cela s’avère le cas, il sera nécessaire de dénoncer avec votre avocat cette démarche et faire nommer un nouvel expert, qui lui, sera neutre. 

Pour éviter les galères 

La réception des travaux est une étape trop souvent sous-estimée des artisans. Bâclée, elle peutentraîner des conséquences désastreuses…

La loi du 4 janvier 1978 a donné à la réception des travaux une importance particulière puisqu’elle devient le point de départ de l’ensemble des garanties, qu’il s’agisse de la garantie de parfait achèvement, de la garantie de bon fonctionnement ou de la responsabilité décennale, même en cas de réserves. C’est pour cette raison qu’il est très fortement conseillé d’établir un procès-verbal pour disposer d’une date ‘’certaine, précise et incontestable’’. Trois éléments définissent cette étape cruciale. La réception est un acte juridique unilatéral, par lequel le maître d’ouvrage déclare réceptionner l’ouvrage avec ou sans réserves. Cette réception est prononcée à la demande de la partie la plus diligente et, dans ce cas, il s’avère que c’est l’entrepreneur qui a le plus intérêt à être rapide. Enfin, elle doit être prononcée contradictoirement entre le maître d’ouvrage et l’entreprise. En effet, l’artisan est en droit d’exiger d’assister aux opérations de réception et d’être dûment convoqué par le maître d’ouvrage, pour fournir toute précision ou éclaircissement qui pourrait s’avérer utile. Si le maître d’ouvrage sollicite la réception, puis que chaque partie signe, elle devient effective s’arrête là. C’est la réception expresse. Il s’agit d’une manifestation expresse de la volonté du maître de l’ouvrage, qui correspond à la forme normale de la réception. Démarrage des différentes garanties, elle permet à l’artisan de s’éviter un contentieux long et aléatoire, qui peut gêner la gestion de son entreprise. La date de la réception est dans ce cas très précise.

De la réception expresse à la réception judiciaire

Il se peut aussi que l’entreprise ne vienne pas ou refuse de signer le procès-verbal de réception. Le maître d’ouvrage le signe, que l’entreprise soit présente ou non, mais à deux conditions : Il doit avoir convoqué l’entreprise par lettre recommandée (c’est le caractère contradictoire), et il doit avoir notifié à l’entrepreneur le procès-verbal de réception avec les réserves, en recommandé. D’autres cas peuvent se présenter comme celui où l’entrepreneur sollicite le maître d’ouvrage. Si ce dernier se déplace et signe le procès-verbal de réception, cette dernière est prononcée, même avec des réserves. S’il ne vient pas ou refuse de le signer, il n’existe pas d’autre solution que de passer par une réception judiciaire. Celle-ci intervient à la demande d’une des deux parties (maître d’ouvrage ou entrepreneur) et dès lors que l’une des parties refuse de réceptionner. C’est le juge des référés qui est alors saisi et désigne à son tour un expert judiciaire. L’objectif est de fournir au tribunal des éléments pour affirmer si la réception peut être prononcée, avec ou sans réserves. Si l’ouvrage ne peut pas être réceptionné en l’état, l’entreprise de travaux paie l’expert et les travaux à réaliser avant d’être convoquée à nouveau. Si l’ouvrage est réceptionnable, avec réserves, le maître d’ouvrage peut signer le procès-verbal avec réserves. S’il ne le veut pas, la réception est alors judiciaire et l’entrepreneur peut saisir le tribunal de grande instance, seul compétent pour statuer sur la réception. En effet, un refus de réception ne peut se justifier que par un inachèvement de l’ouvrage et des imperfections légères n’autorisent pas le maître de l’ouvrage à prononcer la réception.

Une mauvaise habitude

Finalement, la réception tacite, par prise de possession, devient malheureusement la règle. Très souvent, trop souvent, ce type de réception est privilégié par méconnaissance ou facilité. Pour la Cour de Cassation, la réception tacite par prise de possession n’existe que lorsqu’il y a une volonté non équivoque du maître d’ouvrage de réceptionner. L’entrée dans les lieux est exigée mais d’autres éléments importent : Le paiement intégral du prix du marché, la remise des clés et la prise de possession, l’absence de réserves nombreuses et importantes, un constat d’huissier… Cette solution peut s’avérer très dangereuse pour l’entrepreneur. Pour plusieurs raisons. Si le procès-verbal n’est pas en lui-même une condition de l’existence de la réception, il constitue une preuve pour l’entrepreneur en cas de litige. Sans le procès-verbal, il est fortement conseillé à l’artisan de conserver tout document de nature à établir cette prise de possession par le maître d’ouvrage.

La réception est un moment clé ; elle purge les vices apparents, met fin au contrat sauf pour les réserves, et constitue, on ne le dira jamais assez, le point de départ des garanties de parfait achèvement, garantie décennale, responsabilité civile… Pour un entrepreneur, se lancer dans une procédure judiciaire peut s’avérer totalement suicidaire, tant financièrement que psychologiquement, et mieux vaut une bonne fois pour toutes systématiser le procès-verbal de réception.

Les articles clés

L’article L. 111-19 du code de la construction et de l’habitation ainsi que l’article 1 792-6 du code civil constituent les piliers de la réception des travaux.

Exigez la réception

Considérez qu’un chantier n’est jamais terminé tant que vous ne disposez pas d’un procès-verbal de réception signé du maître de l’ouvrage.
L’artisan a tout intérêt à demander systématiquement la réception, par lettre recommandée si nécessaire.

Les sous-traitants sont exclus du système de réception. En pratique, rien n’interdit à un entrepreneur de convoquer ses sous-traitants le jour de la réception.

Réserves : Négociez les délais

En cas de réserves, un délai est souvent nécessaire pour réaliser les travaux de réparation. Il est conseillé à l’artisan de fournir les raisons (techniques, organisation de chantier…) qui justifient la durée de ce travaux. Il arrive, hélas, que des entrepreneurs acceptent des délais trop courts sans pouvoir les tenir. L’entrepreneur et le maître de l’ouvrage signent un accord (les deux signatures sont alors obligatoires, contrairement au procès-verbal de réception), portant sur les réserves, non contestées par l’entrepreneur, et sur le délai d’exécution des travaux à réaliser. Quand l’entrepreneur a exécuté les travaux destinés à faire lever les réserves, et que le maître d’ouvrage donne son accord, l’artisan doit proposer à celui-ci de signer le constat de levée de réserves. Attention : Le maître d’ouvrage peut être sanctionné par les tribunaux s’il s’oppose de façon abusive à la levée des réserves. Mieux vaut, pour se protéger dans un contexte tendu, adresser au maître d’ouvrage une lettre de notification de l’exécution des travaux en lettre recommandée avec avis de réception.

Attention à la remise des clés

Le seul à devoir obligatoirement réceptionner est le maître d’ouvrage. Par maître d’ouvrage, on entend propriétaire du terrain ou de l’immeuble. Dans le cas d’opérations de promotions immobilières, en ‘’vente futur en l’état d’achèvement’’ (VEFA), les artisans commettent parfois quelques confusions entre le vendeur (le promoteur) et l’acquéreur.

Ainsi, il peut y avoir remise des clés sans réception, même si l’entreprise soutient qu’à partir de la remise des clés, la réception est tacite. Par exemple, un promoteur n’est pas satisfait de la livraison d’une opération de logements. Même après la remise des clés, le promoteur garde la qualité de maître d’ouvrage.

A quoi sert la réception ?

Qu’elle soit ou non accompagnée de réserves, la réception est nécessaire. Pourquoi ?

Elle arrête le cours du délai d’exécution.
Elle couvre les malfaçons et les défauts de conformité apparents s’ils n’ont pas fait l’objet de réserves.
Elle entraîne le transfert au maître de l’ouvrage de la garde de l’ouvrage et des risques attenants.
Elle rend exigible le solde des travaux.
Elle constitue le point de départ de la garantie de parfait achèvement et des garanties légales.
Elle constitue le point de départ du délai de restitution de la retenue de garantie ou de libération de la caution.

Dédramatiser le procès-verbal

Il est normal qu’un maître d’ouvrage réceptionne son ouvrage et le mentionne sur un procès- verbal, même en cas de réserves. Il arrive souvent que le maître d’ouvrage refuse de signer un procès-verbal, de crainte d’être alors privé des garanties qu’il tient du contrat avec une entreprise. Il pense abandonner purement et simplement ses droits ! Or, c’est exactement du contraire dont il s’agit. C’est en remplissant un procès-verbal, signé et daté, qu’il sera éventuellement en mesure de mettre en jeu son assurance dommages-ouvrage. 

Qu’est-ce qu’un dommage intermédiaire ?

Par « dommages intermédiaires », on entend les malfaçons qui ne remplissent pas les conditions nécessaires pour être prises en charge au titre des responsabilités décennales ou de bon fonctionnement et qui résultent d’une faute prouvée du constructeur.

Il s’agit donc de désordres non apparents à la réception et qui ne relèvent :

Ni de la garantie de bon fonctionnement, ces désordres ne concernant pas des éléments d’équipement dissociables.
Ni de la garantie décennale : L’ouvrage ou l’un de ses éléments d’équipement indissociables touché par le désordre n’étant pas atteint dans sa solidité et l’ouvrage n’est pas impropre à sa destination.

Entrent dans cette catégorie certains dommages tels que :

L’absence de ventilation de combles, les défauts d’aplomb des cloisons ou de planimétrie des plafonds dans une maison individuelle.
Des désordres qui affectent essentiellement les acrotères des terrasses et les constructions abritant les machineries d’ascenseurs, sans mettre en cause leur solidité ou les rendre impropres à leur destination.

Des fissures peu importantes affectant un carrelage.
Les microfissurations d’un crépi, le cloquage, la fissuration ou le décollement d’un revêtement de façade en plastique, qui ne sont pas de nature à provoquer des infiltrations dans l’immeuble.

Cumul entre la responsabilité pour dommages intermédiaires et la garantie de parfait achèvement

Avec l’entrée en vigueur de la loi du 4 janvier 1978, la question s’est posée de savoir si la responsabilité contractuelle pour dommages intermédiaires n’était pas incompatible avec la nouvelle garantie de parfait achèvement instaurée par l’article 1792-6, alinéa 2, du Code Civil.

En effet, s’agissant de la responsabilité décennale ou de la garantie de bon fonctionnement, la Cour de Cassation a clairement affirmé le caractère exclusif de ces garanties qui ne peuvent se cumuler avec la responsabilité contractuelle de droit commun et notamment la garantie des dommages intermédiaires.

Cependant, il en a été décidé autrement pour la garantie de parfait achèvement puisque les juges considèrent que son champ d’application est différent de celui de la garantie des dommages intermédiaires.

Ainsi, la garantie de parfait achèvement concerne les défauts de conformité apparents au moment de la réception des travaux, sans qu’il soit nécessaire d’apporter la preuve d’une faute de l’entrepreneur à la différence de la garantie des dommages intermédiaires.

Cette distinction est importante car la prescription de ces deux garanties est totalement différente comme nous le verrons un peu plus loin.

Mise en œuvre de la garantie des dommages intermédiaires

Elle nécessite d’apporter la preuve d’une faute du constructeur en raison, le plus souvent, d’un manquement à son obligation de conseil, de compétence ou de précaution.

Il faut, par exemple :

Démontrer que les fissurations non-infiltrantes du pavillon sont dues à une faute de conception ou à un manquement de l’entrepreneur à son devoir de conseil et de compétence vis-à-vis de son client, en ayant choisi un procédé inadéquat qu’il a mis en œuvre sans respecter les prescriptions du DTU.

Démontrer que le mauvais fonctionnement d’une installation de chauffage est dû à la mauvaise évaluation des besoins par l’entreprise de plomberie. Dans cette affaire, la responsabilité de l’entrepreneur a été retenue en raison du non-respect des prescriptions de Gaz de France en termes de rapport entre la puissance de la chaudière et le nombre d’équipements sanitaires pouvant être installé.

Responsabilité de l’entrepreneur du fait de son sous- traitant

Lorsqu’il a recours à un sous-traitant, l’entrepreneur répond, vis-à-vis du maître de l’ouvrage, de la bonne exécution des travaux sous-traités.

A ainsi été retenue la responsabilité contractuelle d’un entrepreneur principal pour des dommages intermédiaires causés par la faute de son sous-traitant qui avait mal exécuté la mise en place de fers et le coulage du béton, provoquant ainsi des fissurations dans la construction.

Prescription de la garantie des dommages intermédiaires

Cette garantie étant une construction des tribunaux, son délai de prescription n’est pas prévu par le Code Civil. Il est donc nécessaire de se référer aux décisions de la Cour de Cassation.
Pour les affaires jugées selon la législation antérieure à la Loi du 04 janvier 1978, les Juges de la Cour de Cassation ont jugé que la réparation de la faute contractuelle pour dommages intermédiaires est soumise à 10 ans à compter de la réception des travaux (et non au délai normal de prescription de l’action contractuelle, à savoir 30 ans à compter de la révélation du désordre).

Pour les affaires jugées selon les dispositions de la loi SPINETTA, la question ne s’est pas posée quant au délai de prescription à appliquer. Cependant, la tendance actuelle est d’harmoniser les délais de prescription et tout porte à croire qu’elle demeure prescrite au bout de 10 ans.

Quelle est la couverture par les assurances de la garantie des dommages intermédiaires ?

Selon la législation antérieure à la loi du 04 janvier 1978, la Cour de Cassation avait décidé que la clause d’une police couvrant ‘’Les dommages pour désordres des gros ouvrages quand la charge en incombe à l’assuré en vertu des articles 1792 et 2270 du Code Civil’’, engageait l’assureur à réparer tous les vices cachés affectant cet ouvrage, y compris les dommages intermédiaires.

Cette jurisprudence s’expliquait par les termes très généraux de l’article 2270 du Code Civil qui permettait de faire entrer les dommages intermédiaires dans son champ d’application.

Or depuis l’entrée en vigueur de la loi du 04 janvier 1978, la nouvelle rédaction de cet article interdit une telle extension puisque sont désormais expressément visées les seules responsabilités et garanties des articles 1792 à 1792-4 du Code Civil.

Dès lors, la clause d’une police d’assurances qui se réfère à l’article 2270 du Code Civil n’entraîne plus la couverture des dommages intermédiaires.

De tels désordres, qui ne relèvent pas de l’assurance de responsabilité obligatoire instituée par la loi de 1978, doivent donc faire l’objet d’une garantie spécifique.

Les dommages intermédiaires, conclusion

D’une part, la garantie des vices intermédiaires, méconnue des entrepreneurs, permet d’engager leur responsabilité alors même que le désordre n’est pas de nature décennale, ni lié au bon fonctionnement.
La faute étant souvent due à un manquement à son devoir de conseil, il est donc extrêmement important de conserver la preuve écrite que le client a été parfaitement informé sur les travaux exécutés.

D’autre part, le risque pour les entreprises du Bâtiment se situe surtout dans la non-couverture par leur assurance de cette garantie. En effet, celle-ci ne relevant pas de l’assurance obligatoire, elle ne figure pas systématiquement dans les contrats, il est donc impératif de faire le point avec son assureur. 

La garantie de parfait achèvement

Création de la loi du 4 janvier 1978 dite loi « SPINETTA », la garantie de parfait achèvement prévue par l’article 1792-6 alinéa 2 et suivants du code civil est la conséquence de la suppression de la réception provisoire qui préexistait avant la refonte du régime de responsabilité des constructeurs.

But de la garantie.

La garantie de parfait achèvement concerne la réparation des désordres qui ont fait l’objet, soit de réserves de la part du maître de l’ouvrage (le client) lors de l’établissement du procès verbal de réception des travaux, soit d’une notification écrite dans un délai déterminé.

Qui est tenu à la garantie et pendant quelle durée ?

La garantie de parfait achèvement n’est due que par l’entrepreneur et ce pendant une durée d’un an à compter de la réception des travaux.

Est-il possible d’y déroger ?

Avant le 1er décembre 1991, date d’entrée en vigueur de la loi n° 90-1129 du 19 décembre 1990 relative au contrat de construction de maison individuelle, il était possible de prévoir contractuellement une durée inférieure (ex : un mois) cette disposition n’étant pas d’ordre public. Depuis cette date, l’article 1792-6 du Code civil prévoyant la garantie de parfait achèvement figure désormais parmi les textes auxquels il ne peut être dérogé, la durée de garantie ne peut être inférieure à un an.

Quels sont les défauts couverts par la garantie ?

Les désordres réparés au titre de la garantie de parfait achèvement sont ceux qui ont été signalés par le maître de l’ouvrage et notamment les vices et défauts de conformité apparents qui ont fait l’objet de réserves sur le procès verbal de réception de travaux.
Un défaut de conformité apparent est un défaut dont le maître d’ouvrage a pu se rendre compte seul, sans le recours d’une personne extérieure (ex : maître d’oeuvre). Le caractère apparent doit donc s’apprécier en fonction des compétences techniques du maître d’ouvrage selon le corps d’état concerné.
La garantie ne s’étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l’usure normale ou de l’usage de l’ouvrage. 

Quelle garantie pour les désordres ayant fait l’objet de réserves à la réception ?

Les désordres faisant l’objet de réserves lors de réception des travaux sont couverts par la garantie de parfait achèvement et non par la garantie décennale, sauf en cas d’aggravation des désordres.
Exemple : une entreprise réalise des enduits. Lors de la réception, le maître d’ouvrage émet des réserves à propos de l’apparition de fissures. Si les fissures ne sont pas infiltrantes et constituent un désordre purement esthétique, il sera fait application de la garantie de parfait achèvement. Par contre, si elles se révèlent infiltrantes et risquent de rendre l’ouvrage impropre à sa destination, les conditions sont remplies pour que soit fait application de la garantie décennale.

Quelle garantie pour les désordres apparus après la réception ?

Les désordres sont ceux ayant fait l’objet d’une notification écrite de la part du maître d’ouvrage à l’entrepreneur dans l’année suivant la date de réception des travaux.
Suivant la nature du désordre, il pourra être invoquée la garantie de parfait achèvement (ex : désordre d’ordre esthétique), la garantie de bon fonctionnement s’il s’agit d’un élément d’équipement dissociable ou de la garantie décennale si les désordres sont d’une telle gravité que l’ouvrage risque de ne plus pouvoir être utilisé conformément à l’usage pour lequel il a été prévu.

Délais pour agir.

Il ne suffit pas seulement pour le maître d’ouvrage d’émettre des réserves lors de la réception, il doit apporter la preuve qu’il a mis tout en œuvre auprès de l’entrepreneur pour que les travaux de reprise soient exécutés.
Le simple envoi d’une lettre recommandée à l’entrepreneur ne suffit pas à justifier la mise en oeuvre de la garantie de parfait achèvement. Le maître de l’ouvrage en cas de carence de l’entrepreneur saisir le tribunal compétent pour suspendre le délai de prescription d’une année. S’il ne le fait pas, il ne pourra pas obtenir réparation sauf à démontrer la faute de l’entrepreneur et passer ainsi sur le terrain des dommages intermédiaires qui échappent à la prescription d’un an.

Quelles sont les conséquences en terme de prise en charge par l’assurance ?

Les conséquences peuvent être importantes puisque la garantie de parfait achèvement relève de la responsabilité contractuelle et n’est pas couverte par les polices d’assurance, contrairement à la responsabilité décennale qui fait l’objet d’une obligation d’assurance. Les travaux de reprise resteront donc à la charge de l’entrepreneur ce qui peut représenter un coût important.

L’exécution des travaux de reprise.

Il n’existe pas de règles précises en la matière. Cependant, il est indispensable de consigner par écrit la liste des travaux qui devront être exécutés, les délais à respecter et une fois ceux-ci réalisés faire signer un constat de levée de réserves.
En l’absence d’accord entre les parties ou en cas de non-respect des délais convenus et après mise en demeure restée sans réponse, les travaux de réfection peuvent être effectués, aux frais et risques de l’entrepreneur défaillant.

En cas de refus du client de lever les réserves malgré la réalisation des travaux, il est conseillé de le faire constater judiciairement.

Marchés publics

La garantie de parfait achèvement existe aussi dans ce type de marché et elle est prévue à l’article 44-1 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) tel qu’il est prévu par le décret du 21 janvier 1976 dans l’attente d’un nouveau CCAG conforme aux dispositions du nouveau code des marchés publics.

Elle est d’une durée de 1 an sauf stipulation différente à compter de la réception de travaux ou de 6 mois à compter de cette date si le marché ne concerne que des travaux d’entretien ou des terrassements.
Dans le cadre des marchés publics, l’obligation de parfait achèvement est beaucoup plus précise puisque l’entrepreneur doit :

– exécuter les travaux et prestations éventuels de finition ou de reprise objet des réserves figurant sur le procès verbal de réception des travaux ;
– remédier à tous les désordres signalés par le maître de l’ouvrage ou le maître d’œuvre, de telle sorte que l’ouvrage soit conforme à l’état où il était lors de la réception ou après correction des imperfections constatées lors de celle-ci ;
– procéder, le cas échéant, aux travaux confortatifs ou modificatifs dont la nécessité serait apparue à l’issue des épreuves effectuées conformément au CCAP ;
– remettre au maître d’œuvre les plans des ouvrages conformes à l’exécution.

Conclusion

Très souvent ignorée car totalement éclipsée par la garantie décennale, la garantie de parfait d’achèvement n’en demeure pas moins l’une des spécificités du régime de responsabilité des constructeurs d’ouvrage de Bâtiment.
Elle constitue une sorte de « service après-vente » d’une durée d’un an pour les désordres dont la gravité ne remet pas en cause la pérennité de l’ouvrage.

Cependant, même si ces désordres sont de faible importance et souvent de nature esthétique, ils peuvent avoir de lourdes conséquences pour l’entrepreneur. 

Si un vice caché affecte vos travaux après leur réception par votre client, vous êtes tenu de trois garanties : parfait achèvement (un an), bon fonctionnement (deux ans), décennale (dix ans).

La réception est donc une étape essentielle !

Il est primordial de faire signer au client un procès-verbal de réception. Avant de faire jouer vos garanties, votre assureur décennal vous demandera toujours de justifier de la réception de vos travaux par le client.

Pour engager la responsabilité décennale d’une entreprise, le dommage doit soit porter atteinte à la solidité de l’ouvrage, soit le rendre impropre à sa destination. La solidité peut être constatée de manière objective par une expertise. L’impropriété à destination est une notion plus subjective qui dépend chaque fois des circonstances.

Que faire pour s’exonérer de sa responsabilité décennale ?

La loi prévoit trois possibilités, mais elles sont rarement retenues par les tribunaux.

1. La force majeure : c’est-à-dire la survenance d’un événement extérieur à l’entreprise qu’il lui était impossible de prévoir (une tempête n’est pas un cas de force majeure, ni même la sécheresse, pas plus qu’une crue centennale).

2. Le fait d’un tiers (destruction du bâtiment par un incendie criminel, par exemple).

3. La faute du maître d’ouvrage : Plusieurs conditions doivent être réunies par l’entreprise. Il lui faudra prouver que le maître d’ouvrage est compétent en matière de construction et qu’il s’est immiscé fautivement dans la construction. Autant dire que le cas est rare. 

Ne négligez pas les réserves !

Si vous estimez que le client veut vous imposer une solution technique dangereuse, ou s’il refuse le temps de séchage de vos travaux… vous devez l’informer du risque qu’il prend en émettant des réserves.

Pour être retenues, les réserves doivent comporter quatre éléments : 

  • Indiquer pour quelle raison la solution retenue ou les travaux sont inadaptés
  • Quelles en seraient les conséquences (décrire le sinistre probable)
  • Proposer la solution technique alternative adaptée, la plus proche de ses attentes (la décrire)
  • Indiquer le coût.

Faites les par écrit et pensez à en garder la preuve (lettre recommandée avec accusé de réception). 

C’est un sujet qui revient souvent dans l’abondante jurisprudence sur les litiges liés à la responsabilité décennale : l’inadéquation entre activité réalisée par le constructeur et activité effectivement garantie par l’assureur.

Comme toute assurance, l’assurance de responsabilité décennale coûte cher et nécessite une procédure dont l’entrepreneur se passerait bien. D’autant plus que de très nombreuses années peuvent s’écouler avant d’avoir besoin de faire appel à son assureur pour un sinistre de nature décennale. L’impression de perte d’argent et de temps conduit ainsi parfois l’assuré à ne plus contrôler les conditions de son contrat et sa concordance avec son métier. Et ce malgré les relances de l’assureur à chaque échéance annuelle.

Grave erreur ! Une activité non déclarée au contrat n’est tout simplement pas couverte. C’est à dire qu’en cas de sinistre, l’assureur ne prendra en charge aucun frais de réparation des dommages réclamés par le propriétaire de l’ouvrage. Les dommages de nature décennale étant toujours d’une certaine gravité, le risque est donc grand de mettre en difficulté toute l’économie de son entreprise pour un seul sinistre.

Notre préconisation : vérifier chaque année les activités déclarées

Pour être sûr que le contrat d’assurance couvre bien toutes les activités réalisées, il est donc fortement conseillé de contrôler à chaque échéance annuelle les différentes activités assurées. Ces activités sont normalement indiquées sur l’avis d’échéance envoyé obligatoirement par l’assureur au moins deux mois avant la date d’échéance. Elles comprennent les techniques et procédés de construction que l’artisan peut utiliser pour réaliser son ouvrage. A contrario, si une technique utilisée par l’artisan n’est pas indiquée sur ce document ou sur les conditions particulières du contrat, il y a de fortes chances qu’elle ne soit pas couverte. C’est notamment le cas pour les procédés techniques novateurs qui n’ont pas encore été « évalués » par les assureurs.

En plus de ce contrôle annuel, il est fondamental de déclarer en cours d’année à l’assureur tout nouveau procédé technique employé. Si ce dernier ne rentre pas dans le cadre des activités garanties par le contrat, la signature d’un avenant est nécessaire, sous peine d’absence de garantie en cas de sinistre sur un ouvrage réalisé à l’aide ce nouveau procédé technique.

Un document de contrôle utile : la nomenclature des activités du BTP

Pour aider les assureurs et entrepreneurs du BTP à déterminer le périmètre à assurer, la Fédération Française de l’Assurance publie et met à jour régulièrement la nomenclature des activités du BTP. Cette nomenclature, profondément révisée au printemps 2019, répertorie avec précision les activités pratiquées par les professionnels du bâtiment.

Chaque activité (couverture, plomberie, piscines, photovoltaïque, étanchéité de toiture…) est détaillée et comprend à la fois les travaux de conception et de réalisation, ainsi que les travaux accessoires inhérents à l’activité principale. Exemple : l’activité annexe « VRD » est comprise dans l’activité principale « travaux de maçonnerie ».

À l’aide ce document, l’assureur doit pouvoir déterminer exactement les activités à garantir et l’entrepreneur doit pouvoir contrôler si certaines de ses activités n’ont pas été omises par l’assureur. 

Attention il n’est pas rare que la compagnie qui vous assure introduise des variantes et ce notamment en incluant des exclusions, voici quelques exemples :

  • Maçonnerie, exclusion de la démolition
  • Bardage, exclusion du bardage horizontal
  • Charpente bois, exclusion des ossatures bois même de moins de 20m2, exclusion des traitement curatifs…
  • Etanchéité toiture terrasse, limitation de surface, exclusion de la résine
  • Carrelage, exclusion des sols coulés ou limitation de surface
  • Plomberie-chauffage, exclusion de la maintenance de chaudières que vous n’avez pas installer

Nous vous conseillons de bien lire la nomenclature des activités associées à votre contrat.

Si chacun connaît la célèbre maxime « Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer » qui, en revanche, pense également à la prudence requise en toutes circonstances ?

A l’heure de la révolution numérique et de la concurrence à tout va l’entrepreneur est partout et doit répondre à tous : ses clients comptent sur sa réactivité, ses compétences techniques et son professionnalisme. Il est donc plus que jamais indispensable d’attirer l’attention du chef d’entreprise sur l’étendue tentaculaire de son devoir de conseil, étendue dont il y a fort à parier qu’il en ignore les limites… Se cantonner au respect des seules obligations découlant du contrat signé est prendre de très grands risques pouvant, le cas échéant, se traduire en procédure judiciaire, expertise, condamnation à indemnisation… avec tous les risques que cela comporte pour la trésorerie et la pérennité de l’entreprise.

Qu’est-ce que le devoir de conseil ?

Le principe ancien, repris dans la réforme du droit des contrats issue de l’ordonnance du 10 février 2016 ratifiée par la loi du 20 avril 2018 et plus précisément dans l’article 1194 du Code civil qui dispose : « Les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l’équité, l’usage ou la loi. »

« L’équité, l’usage ou la loi » : ces termes sont restés et traduisent la permanence du principe : tout professionnel – du terrassier au maître d’œuvre – est tenu avant réception à un devoir de conseil que le chef d’entreprise ferait bien de toujours avoir à l’esprit s’il veut éviter de graves déboires.

Il n’est pas excessif de parler de véritable « permanente obligation de conseil » dont la violation est susceptible d’engager sa responsabilité, par exemple dans les cas suivants tirés de situations réelles :

  • du défaut de conseil quant au caractère inondable du terrain et ses conséquences sur l’habitabilité de la construction projetée ;
  • de l’obligation d’informer le maître de l’ouvrage sur les conséquences des travaux envisagés ;
  • de l’obligation d’informer le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre de la présence de mérule détectée lors des travaux ;
  • de l’obligation d’informer les intervenants le précédant et le maître d’œuvre des contraintes des matériaux qu’il lui est demandé de mettre en œuvre ;
  • de l’obligation d’analyser les contraintes urbanistiques, particulièrement en l’absence de maître d’œuvre et de plans d’implantation ;
  • de l’obligation de conseil sur la réglementation applicable ;
  • de l’obligation de contrôler les quantités au regard des plans et contraintes du projet ;
  • du risque lié à une reprise partielle des fondations ;
  • de l’obligation de conseil renforcé en l’absence de maîtrise d’œuvre ;
  • de l’obligation de conseil portant sur les prestations réalisées par le maître de l’ouvrage lui-même ;
  • du devoir de contrôle de l’état de l’existant et de formulation de réserves si nécessaire ;
  • du devoir de critiquer le support de son intervention s’il l’estime déficient ;
  • du défaut de mise en garde des conséquences de la modification du programme initial ;
  • du conseil sur les matériaux à mettre en œuvre et la nécessité de compléter le programme envisagé ; 
  • de l’obligation d’informer le maître de l’ouvrage des risques présentés par les travaux envisagés au regard de l’état de l’existant ;
  • de l’implantation de l’ouvrage ;
  • du défaut d’avertissement sur les risques de nuisances au tiers à raison de l’installation d’un extracteur d’air sur le toit de l’immeuble;
  • du défaut de proposition d’adaptation du projet en considération d’inondation survenue en cours de chantier ;
  • de l’absence de conseil quant aux conditions d’utilisation et de maintenance après réception.
  • A la lecture de ces exemples tirés de cas réels nul doute que chacun pensera évidemment à des cas le concernant !

Risques de condamnation

La Cour de cassation va encore plus loin puisqu’elle admet également la condamnation du professionnel pour manquement à son devoir de critique, par exemple au sujet de :

  • la nécessité de recourir à un maître d’œuvre ;
  • la nécessité d’un permis de construire ou de son respect ;
  • l’insuffisance des travaux envisagés ou des matériaux choisis ;
  • du nécessaire devoir de critique des plans ou des matériaux qui lui ont été fournis par le maître de l’ouvrage ;
  • des choix de la maîtrise d’œuvre ou des constatations de l’expert judiciaire servant de base aux travaux de reprise (on peut toutefois s’interroger ici sur la pertinence de cette extension de responsabilité alors qu’un expert judiciaire faisant autorité a été désigné pour préconiser des solutions réparatoires…) ;
  • du devoir de refuser l’exécution de travaux non conformes et dangereux ;
  • critique du support réalisé par un autre colocataire, mais non de procéder à des sondages destructifs pour vérifier l’existence de l’étanchéité ou encore obligation de souligner les risques liés à l’absence de traitement préalable du support ;
  • de la nécessité d’analyser l’existant et devoir d’adaptation et de critiques du projet envisagé s’il y a lieu ;
  • de l’obligation d’avertir le maître de l’ouvrage, pourtant titulaire d’un CAP en bâtiment, des risques induits par l’interruption du chantier pendant de nombreux mois ;
  • de l’obligation d’avertir le maître de l’ouvrage des risques induits par l’absence de relevé topographique. (*)

On le voit, les décisions prononcées par les magistrats ne laissent plus qu’une seule place à l’irresponsabilité de l’entrepreneur : la véritable cause étrangère qui ne lui aurait pas permis de parvenir à l’obligation de résultat à laquelle il est tenu.

« L’entrepreneur sera bien avisé de toujours laisser des traces écrites »

Comme en matière de responsabilité décennale, la jurisprudence française renforce sans cesse la protection du maître d’ouvrage, a priori profane et bien souvent en situation d’infériorité économique face à l’entreprise prestataire.

Dans cette mesure, l’entrepreneur sera bien avisé de toujours laisser des traces écrites destinées à prouver si besoin qu’il a bien exercé son devoir de conseil et ne saurait être tenu pour responsable des dommages ultérieurement survenus. Confirmer les points essentiels d’une conversation par un écrit rapide auprès du maître d’ouvrage ou des sous- traitants est une habitude à prendre : elle permettra d’éviter bien des difficultés à l’entreprise et même plus : temps perdu, frais de justice, stress… Autant d’énergie et de chiffre d’affaires envolés bien inutilement !