Comment éviter les tribunaux

Aujourd’hui, les entreprises doivent aller de plus en plus vite pour rédiger leur devis et pour exécuter leurs travaux. Un certain nombre de moyens sont proposés aux clients pour entraîner à tort ou à raison les entreprises dans la spirale des experts d’assurances ou des tribunaux. En effet, les consommateurs disposent très souvent d’une protection juridique d’assurance, ou appartiennent à un organisme de consommateur. A l’intérieur de ses associations ou de ces services juridiques, des juristes informent directement leurs adhérents et mènent ensemble des actions contre les entreprises. Il est donc nécessaire pour les entreprises de comprendre les mécanismes de l’expertise afin de modifier leur comportement.

Il y a donc plusieurs types d’expertise

1. L’expertise amiable privée (organisée par les plaignants), 2. L’expertise amiable organisée par les assurances,
3. L’expertise judiciaire civile et administrative.

Eviter les pièges et mieux se défendre est vital pour une entreprise de bonne foi. Pourtant, par méconnaissance au regard de ses obligations, elle est très souvent condamnée.

Principe : De l’expertise amiable (privée ou en assurance).

Contrairement à l’expert judiciaire, l’expert amiable est lié par contrat à la partie qui le désigne, ce qui a donné naissance à des controverses, notamment en matière d’assurances (domaine où le recours à l’expertise amiable est le plus fréquent) à propos de la nature de ce lien juridique et des obligations qui en découlent.

Déroulement de l’expertise amiable.
Comme en matière d’expertise judiciaire, la mission de l’expert est limitée à des questions techniques. Les experts consignent leurs constatations, observations et conclusions dans un rapport : l’expertise est close quand les experts ont remis leur rapport aux particuliers qui ont requis leurs avis.

Les règles strictes de l’expertise judiciaire ne sont pas applicables à l’expertise amiable, sauf en ce qui concerne la convocation des parties (NCPC, art. 160) et la présence des experts aux opérations (NCPC, art. 233).

En raison de la convention qui le lie aux parties, l’expert amiable peut voir sa responsabilité contractuelle mise en jeu en cas d’inexécution fautive du contrat.

Hormis cette hypothèse, il répond, en vertu de l’article 1382 du Code civil, aux conséquences des fautes dommageables qu’il commet dans l’exercice de sa mission. Sa responsabilité pénale peut également être engagée.

Principe : De l’expertise judiciaire civile et administrative

L’article 232 du Nouveau Code de procédure civile permet au juge de désigner toute personne de son choix pour l’éclairer sur une question de fait qui requiert les lumières d’un technicien.

Le technicien est un auxiliaire de la justice et non le mandataire des parties : le juge n’est donc pas lié par le choix préalable des parties de telle ou telle personne.

Le technicien ou l’expert qui effectue la mission que lui confie le juge n’exerce pas une profession mais exécute un mandat de justice. Il n’est pas protégé par un statut professionnel : le juge n’est pas tenu de choisir un technicien inscrit sur une liste d’experts.

Pour faciliter le choix du juge, des listes d’experts sont établies chaque année. Il est dressé une liste par la cour d’appel et une liste nationale.

Bien que le juge puisse désigner un expert non inscrit, dans la quasi-totalité des cas, les experts choisis sont ceux qui figurent sur les listes.

L’expertise est contradictoire ou non contradictoire suivant qu’elle est pratiquée en présence de toutes les parties ou d’une seule des parties.

Malgré son caractère technique, l’expertise est par nature un acte judiciaire soumis aux règles qui régissent les procès civils. Pour être opposable aux parties, elle doit donc respecter le principe de la contradiction résultant de l’article 16 du Nouveau Code de procédure civile

Ceci oblige notamment l’expert à :

1. Convoquer les parties à l’expertise,
2. Procéder à la visite des lieux en leurs présences,
3. Mettre les parties à même de présenter leurs observations. 

Il est donc nécessaire pour éviter d’être pris dans l’engrenage de l’expertise (privée ou judiciaire) de bien préparer en amont les pièces de son marché.

Voici en 10 points les pièges à éviter

1. Le devis est un document contractuel qui permet de fixer ce que doit fournir l’entreprise. Il faut donc que ce document soit rédigé avec minutie sans oublier de détailler le prix de l’entreprise et le type de matériaux mis en œuvre. Le fait de détailler son devis peut éviter aux clients de remettre en question le travail réalisé par l’entreprise.

2. Le devis doit faire l’objet d’une attention toute particulière notamment en ce qui concerne les métrés et doit être le reflet exact des travaux à exécuter afin éviter toute contestation de la part du client. Ex : En peinture, les entreprises ont tendance à établir des devis de ravalement de façade « Vide pour plein ». Elles estiment que les tableaux, voussures et appuis en surface développés représentent le vide pour plein de la façade. C’est ce qu’on appelle « les habitudes de travail des entreprises ». Il est préférable dans ce cas de détailler la façade et le travail sur les tableaux, les voussures et les appuis en quatre postes bien distincts. Dans un devis, il est possible de remettre en cause les surfaces mais très rarement les prix sauf en cas d’abus manifeste.

3. Un certain nombre de conditions doivent être également inscrites au devis :

a. Délais d’exécution,
b. Délai de validité de l’offre, c. Mode de règlement,
d. Etc.

4.Pour que l’entreprise prétende au paiement des travaux, le devis doit impérativement être signé par le ou les clients et par l’entreprise et spécifier la mention : « Bon pour Acceptation ou Bon pour Accord ».

5. Lorsque le devis est signé et que les travaux sont engagés, il faut ensuite respecter le planning d’intervention prévu avec le client. Si l’entreprise est contrainte de dépasser le délai prévu, le client doit être prévenu dans les meilleurs délais. Cette précaution évitera bon nombre de conflits.

6. Si le client décide d’agrandir la surface d’intervention de l’entreprise en cours de chantier, il faut absolument que l’entrepreneur rédige, même à main levée, un avenant que devra signer le client pour éviter toute source de contestation lors de l’établissement de la facture finale.

7. Après les travaux, la facture doit être rédigée. C’est une obligation de l’entreprise. Elle doit reprendre l’énoncé du devis et lister les travaux complémentaires réalisés en des termes clairs et compréhensibles par le client. 

8. Lorsque sur un devis l’entrepreneur stipule une marque, un format ou une couleur, il est important de respecter ces engagements. En cas de changement de produit ou de marque demandée par le client en cours de réalisation du chantier, l’entrepreneur doit le stipuler par écrit.

9. A la fin des travaux, il faut établir un procès verbal de réception si possible en même temps que la facture finale. Cette réception génère le point de départ des garanties de parfait achèvement et des garanties décennales.

10. L’entreprise devra avant tout respecter les règles de l’art lors de l’exécution des travaux. En cas de doute sur la réalisation ou la fabrication d’une de ses tâches, elle doit se rapprocher d’un bureau d’étude ou d’un cabinet de professionnels qui devra fournir une réponse écrite.

Malgré tout, si pour différentes raisons le client vous entraîne dans la ronde des experts, il est important de prouver votre bonne foi en fournissant des écrits (devis, factures, réceptions, courriers divers, plannings, etc.).

Pendant l’expertise en assurance ou judiciaire, il est important :

1. D’avoir préparé son dossier,
2. D’être présent,
3. D’être actif dans les discussions,
4. De ne jamais se moquer de l’expert car c’est lui qui va rédiger un rapport,
5. De ne jamais bousculer verbalement l’expert,
6. De ne jamais partir en cours d’opération d’expertise,
7. De vous faire représenter par un avocat maîtrisant le droit de la construction si l’affaire est importante (ils sont peu nombreux, il faut alors faire attention au choix),
8. De se faire représenter par un autre expert si l’entreprise ne se sent pas de taille à affronter un expert.

Important pour conclure

Aujourd’hui, il y a plusieurs types d’experts : privés, d’assurances et judiciaires. Quand l’entreprise de bâtiment souhaite se faire représenter, il est important qu’elle choisisse un expert qui soit absolument neutre par rapport au système des assurances. Dans le cadre d’une expertise judiciaire, il faudra aussi s’assurer du fait que l’expert ne réalise pas d’expertise en assurance. Si cela s’avère le cas, il sera nécessaire de dénoncer avec votre avocat cette démarche et faire nommer un nouvel expert, qui lui, sera neutre. 

Pour éviter les galères 

La réception des travaux est une étape trop souvent sous-estimée des artisans. Bâclée, elle peutentraîner des conséquences désastreuses…

La loi du 4 janvier 1978 a donné à la réception des travaux une importance particulière puisqu’elle devient le point de départ de l’ensemble des garanties, qu’il s’agisse de la garantie de parfait achèvement, de la garantie de bon fonctionnement ou de la responsabilité décennale, même en cas de réserves. C’est pour cette raison qu’il est très fortement conseillé d’établir un procès-verbal pour disposer d’une date ‘’certaine, précise et incontestable’’. Trois éléments définissent cette étape cruciale. La réception est un acte juridique unilatéral, par lequel le maître d’ouvrage déclare réceptionner l’ouvrage avec ou sans réserves. Cette réception est prononcée à la demande de la partie la plus diligente et, dans ce cas, il s’avère que c’est l’entrepreneur qui a le plus intérêt à être rapide. Enfin, elle doit être prononcée contradictoirement entre le maître d’ouvrage et l’entreprise. En effet, l’artisan est en droit d’exiger d’assister aux opérations de réception et d’être dûment convoqué par le maître d’ouvrage, pour fournir toute précision ou éclaircissement qui pourrait s’avérer utile. Si le maître d’ouvrage sollicite la réception, puis que chaque partie signe, elle devient effective s’arrête là. C’est la réception expresse. Il s’agit d’une manifestation expresse de la volonté du maître de l’ouvrage, qui correspond à la forme normale de la réception. Démarrage des différentes garanties, elle permet à l’artisan de s’éviter un contentieux long et aléatoire, qui peut gêner la gestion de son entreprise. La date de la réception est dans ce cas très précise.

De la réception expresse à la réception judiciaire

Il se peut aussi que l’entreprise ne vienne pas ou refuse de signer le procès-verbal de réception. Le maître d’ouvrage le signe, que l’entreprise soit présente ou non, mais à deux conditions : Il doit avoir convoqué l’entreprise par lettre recommandée (c’est le caractère contradictoire), et il doit avoir notifié à l’entrepreneur le procès-verbal de réception avec les réserves, en recommandé. D’autres cas peuvent se présenter comme celui où l’entrepreneur sollicite le maître d’ouvrage. Si ce dernier se déplace et signe le procès-verbal de réception, cette dernière est prononcée, même avec des réserves. S’il ne vient pas ou refuse de le signer, il n’existe pas d’autre solution que de passer par une réception judiciaire. Celle-ci intervient à la demande d’une des deux parties (maître d’ouvrage ou entrepreneur) et dès lors que l’une des parties refuse de réceptionner. C’est le juge des référés qui est alors saisi et désigne à son tour un expert judiciaire. L’objectif est de fournir au tribunal des éléments pour affirmer si la réception peut être prononcée, avec ou sans réserves. Si l’ouvrage ne peut pas être réceptionné en l’état, l’entreprise de travaux paie l’expert et les travaux à réaliser avant d’être convoquée à nouveau. Si l’ouvrage est réceptionnable, avec réserves, le maître d’ouvrage peut signer le procès-verbal avec réserves. S’il ne le veut pas, la réception est alors judiciaire et l’entrepreneur peut saisir le tribunal de grande instance, seul compétent pour statuer sur la réception. En effet, un refus de réception ne peut se justifier que par un inachèvement de l’ouvrage et des imperfections légères n’autorisent pas le maître de l’ouvrage à prononcer la réception.

Une mauvaise habitude

Finalement, la réception tacite, par prise de possession, devient malheureusement la règle. Très souvent, trop souvent, ce type de réception est privilégié par méconnaissance ou facilité. Pour la Cour de Cassation, la réception tacite par prise de possession n’existe que lorsqu’il y a une volonté non équivoque du maître d’ouvrage de réceptionner. L’entrée dans les lieux est exigée mais d’autres éléments importent : Le paiement intégral du prix du marché, la remise des clés et la prise de possession, l’absence de réserves nombreuses et importantes, un constat d’huissier… Cette solution peut s’avérer très dangereuse pour l’entrepreneur. Pour plusieurs raisons. Si le procès-verbal n’est pas en lui-même une condition de l’existence de la réception, il constitue une preuve pour l’entrepreneur en cas de litige. Sans le procès-verbal, il est fortement conseillé à l’artisan de conserver tout document de nature à établir cette prise de possession par le maître d’ouvrage.

La réception est un moment clé ; elle purge les vices apparents, met fin au contrat sauf pour les réserves, et constitue, on ne le dira jamais assez, le point de départ des garanties de parfait achèvement, garantie décennale, responsabilité civile… Pour un entrepreneur, se lancer dans une procédure judiciaire peut s’avérer totalement suicidaire, tant financièrement que psychologiquement, et mieux vaut une bonne fois pour toutes systématiser le procès-verbal de réception.

Les articles clés

L’article L. 111-19 du code de la construction et de l’habitation ainsi que l’article 1 792-6 du code civil constituent les piliers de la réception des travaux.

Exigez la réception

Considérez qu’un chantier n’est jamais terminé tant que vous ne disposez pas d’un procès-verbal de réception signé du maître de l’ouvrage.
L’artisan a tout intérêt à demander systématiquement la réception, par lettre recommandée si nécessaire.

Les sous-traitants sont exclus du système de réception. En pratique, rien n’interdit à un entrepreneur de convoquer ses sous-traitants le jour de la réception.

Réserves : Négociez les délais

En cas de réserves, un délai est souvent nécessaire pour réaliser les travaux de réparation. Il est conseillé à l’artisan de fournir les raisons (techniques, organisation de chantier…) qui justifient la durée de ce travaux. Il arrive, hélas, que des entrepreneurs acceptent des délais trop courts sans pouvoir les tenir. L’entrepreneur et le maître de l’ouvrage signent un accord (les deux signatures sont alors obligatoires, contrairement au procès-verbal de réception), portant sur les réserves, non contestées par l’entrepreneur, et sur le délai d’exécution des travaux à réaliser. Quand l’entrepreneur a exécuté les travaux destinés à faire lever les réserves, et que le maître d’ouvrage donne son accord, l’artisan doit proposer à celui-ci de signer le constat de levée de réserves. Attention : Le maître d’ouvrage peut être sanctionné par les tribunaux s’il s’oppose de façon abusive à la levée des réserves. Mieux vaut, pour se protéger dans un contexte tendu, adresser au maître d’ouvrage une lettre de notification de l’exécution des travaux en lettre recommandée avec avis de réception.

Attention à la remise des clés

Le seul à devoir obligatoirement réceptionner est le maître d’ouvrage. Par maître d’ouvrage, on entend propriétaire du terrain ou de l’immeuble. Dans le cas d’opérations de promotions immobilières, en ‘’vente futur en l’état d’achèvement’’ (VEFA), les artisans commettent parfois quelques confusions entre le vendeur (le promoteur) et l’acquéreur.

Ainsi, il peut y avoir remise des clés sans réception, même si l’entreprise soutient qu’à partir de la remise des clés, la réception est tacite. Par exemple, un promoteur n’est pas satisfait de la livraison d’une opération de logements. Même après la remise des clés, le promoteur garde la qualité de maître d’ouvrage.

A quoi sert la réception ?

Qu’elle soit ou non accompagnée de réserves, la réception est nécessaire. Pourquoi ?

Elle arrête le cours du délai d’exécution.
Elle couvre les malfaçons et les défauts de conformité apparents s’ils n’ont pas fait l’objet de réserves.
Elle entraîne le transfert au maître de l’ouvrage de la garde de l’ouvrage et des risques attenants.
Elle rend exigible le solde des travaux.
Elle constitue le point de départ de la garantie de parfait achèvement et des garanties légales.
Elle constitue le point de départ du délai de restitution de la retenue de garantie ou de libération de la caution.

Dédramatiser le procès-verbal

Il est normal qu’un maître d’ouvrage réceptionne son ouvrage et le mentionne sur un procès- verbal, même en cas de réserves. Il arrive souvent que le maître d’ouvrage refuse de signer un procès-verbal, de crainte d’être alors privé des garanties qu’il tient du contrat avec une entreprise. Il pense abandonner purement et simplement ses droits ! Or, c’est exactement du contraire dont il s’agit. C’est en remplissant un procès-verbal, signé et daté, qu’il sera éventuellement en mesure de mettre en jeu son assurance dommages-ouvrage. 

Qu’est-ce qu’un dommage intermédiaire ?

Par « dommages intermédiaires », on entend les malfaçons qui ne remplissent pas les conditions nécessaires pour être prises en charge au titre des responsabilités décennales ou de bon fonctionnement et qui résultent d’une faute prouvée du constructeur.

Il s’agit donc de désordres non apparents à la réception et qui ne relèvent :

Ni de la garantie de bon fonctionnement, ces désordres ne concernant pas des éléments d’équipement dissociables.
Ni de la garantie décennale : L’ouvrage ou l’un de ses éléments d’équipement indissociables touché par le désordre n’étant pas atteint dans sa solidité et l’ouvrage n’est pas impropre à sa destination.

Entrent dans cette catégorie certains dommages tels que :

L’absence de ventilation de combles, les défauts d’aplomb des cloisons ou de planimétrie des plafonds dans une maison individuelle.
Des désordres qui affectent essentiellement les acrotères des terrasses et les constructions abritant les machineries d’ascenseurs, sans mettre en cause leur solidité ou les rendre impropres à leur destination.

Des fissures peu importantes affectant un carrelage.
Les microfissurations d’un crépi, le cloquage, la fissuration ou le décollement d’un revêtement de façade en plastique, qui ne sont pas de nature à provoquer des infiltrations dans l’immeuble.

Cumul entre la responsabilité pour dommages intermédiaires et la garantie de parfait achèvement

Avec l’entrée en vigueur de la loi du 4 janvier 1978, la question s’est posée de savoir si la responsabilité contractuelle pour dommages intermédiaires n’était pas incompatible avec la nouvelle garantie de parfait achèvement instaurée par l’article 1792-6, alinéa 2, du Code Civil.

En effet, s’agissant de la responsabilité décennale ou de la garantie de bon fonctionnement, la Cour de Cassation a clairement affirmé le caractère exclusif de ces garanties qui ne peuvent se cumuler avec la responsabilité contractuelle de droit commun et notamment la garantie des dommages intermédiaires.

Cependant, il en a été décidé autrement pour la garantie de parfait achèvement puisque les juges considèrent que son champ d’application est différent de celui de la garantie des dommages intermédiaires.

Ainsi, la garantie de parfait achèvement concerne les défauts de conformité apparents au moment de la réception des travaux, sans qu’il soit nécessaire d’apporter la preuve d’une faute de l’entrepreneur à la différence de la garantie des dommages intermédiaires.

Cette distinction est importante car la prescription de ces deux garanties est totalement différente comme nous le verrons un peu plus loin.

Mise en œuvre de la garantie des dommages intermédiaires

Elle nécessite d’apporter la preuve d’une faute du constructeur en raison, le plus souvent, d’un manquement à son obligation de conseil, de compétence ou de précaution.

Il faut, par exemple :

Démontrer que les fissurations non-infiltrantes du pavillon sont dues à une faute de conception ou à un manquement de l’entrepreneur à son devoir de conseil et de compétence vis-à-vis de son client, en ayant choisi un procédé inadéquat qu’il a mis en œuvre sans respecter les prescriptions du DTU.

Démontrer que le mauvais fonctionnement d’une installation de chauffage est dû à la mauvaise évaluation des besoins par l’entreprise de plomberie. Dans cette affaire, la responsabilité de l’entrepreneur a été retenue en raison du non-respect des prescriptions de Gaz de France en termes de rapport entre la puissance de la chaudière et le nombre d’équipements sanitaires pouvant être installé.

Responsabilité de l’entrepreneur du fait de son sous- traitant

Lorsqu’il a recours à un sous-traitant, l’entrepreneur répond, vis-à-vis du maître de l’ouvrage, de la bonne exécution des travaux sous-traités.

A ainsi été retenue la responsabilité contractuelle d’un entrepreneur principal pour des dommages intermédiaires causés par la faute de son sous-traitant qui avait mal exécuté la mise en place de fers et le coulage du béton, provoquant ainsi des fissurations dans la construction.

Prescription de la garantie des dommages intermédiaires

Cette garantie étant une construction des tribunaux, son délai de prescription n’est pas prévu par le Code Civil. Il est donc nécessaire de se référer aux décisions de la Cour de Cassation.
Pour les affaires jugées selon la législation antérieure à la Loi du 04 janvier 1978, les Juges de la Cour de Cassation ont jugé que la réparation de la faute contractuelle pour dommages intermédiaires est soumise à 10 ans à compter de la réception des travaux (et non au délai normal de prescription de l’action contractuelle, à savoir 30 ans à compter de la révélation du désordre).

Pour les affaires jugées selon les dispositions de la loi SPINETTA, la question ne s’est pas posée quant au délai de prescription à appliquer. Cependant, la tendance actuelle est d’harmoniser les délais de prescription et tout porte à croire qu’elle demeure prescrite au bout de 10 ans.

Quelle est la couverture par les assurances de la garantie des dommages intermédiaires ?

Selon la législation antérieure à la loi du 04 janvier 1978, la Cour de Cassation avait décidé que la clause d’une police couvrant ‘’Les dommages pour désordres des gros ouvrages quand la charge en incombe à l’assuré en vertu des articles 1792 et 2270 du Code Civil’’, engageait l’assureur à réparer tous les vices cachés affectant cet ouvrage, y compris les dommages intermédiaires.

Cette jurisprudence s’expliquait par les termes très généraux de l’article 2270 du Code Civil qui permettait de faire entrer les dommages intermédiaires dans son champ d’application.

Or depuis l’entrée en vigueur de la loi du 04 janvier 1978, la nouvelle rédaction de cet article interdit une telle extension puisque sont désormais expressément visées les seules responsabilités et garanties des articles 1792 à 1792-4 du Code Civil.

Dès lors, la clause d’une police d’assurances qui se réfère à l’article 2270 du Code Civil n’entraîne plus la couverture des dommages intermédiaires.

De tels désordres, qui ne relèvent pas de l’assurance de responsabilité obligatoire instituée par la loi de 1978, doivent donc faire l’objet d’une garantie spécifique.

Les dommages intermédiaires, conclusion

D’une part, la garantie des vices intermédiaires, méconnue des entrepreneurs, permet d’engager leur responsabilité alors même que le désordre n’est pas de nature décennale, ni lié au bon fonctionnement.
La faute étant souvent due à un manquement à son devoir de conseil, il est donc extrêmement important de conserver la preuve écrite que le client a été parfaitement informé sur les travaux exécutés.

D’autre part, le risque pour les entreprises du Bâtiment se situe surtout dans la non-couverture par leur assurance de cette garantie. En effet, celle-ci ne relevant pas de l’assurance obligatoire, elle ne figure pas systématiquement dans les contrats, il est donc impératif de faire le point avec son assureur.