Qu’est-ce qu’un dommage intermédiaire ?

Par « dommages intermédiaires », on entend les malfaçons qui ne remplissent pas les conditions nécessaires pour être prises en charge au titre des responsabilités décennales ou de bon fonctionnement et qui résultent d’une faute prouvée du constructeur.

Il s’agit donc de désordres non apparents à la réception et qui ne relèvent :

Ni de la garantie de bon fonctionnement, ces désordres ne concernant pas des éléments d’équipement dissociables.
Ni de la garantie décennale : L’ouvrage ou l’un de ses éléments d’équipement indissociables touché par le désordre n’étant pas atteint dans sa solidité et l’ouvrage n’est pas impropre à sa destination.

Entrent dans cette catégorie certains dommages tels que :

L’absence de ventilation de combles, les défauts d’aplomb des cloisons ou de planimétrie des plafonds dans une maison individuelle.
Des désordres qui affectent essentiellement les acrotères des terrasses et les constructions abritant les machineries d’ascenseurs, sans mettre en cause leur solidité ou les rendre impropres à leur destination.

Des fissures peu importantes affectant un carrelage.
Les microfissurations d’un crépi, le cloquage, la fissuration ou le décollement d’un revêtement de façade en plastique, qui ne sont pas de nature à provoquer des infiltrations dans l’immeuble.

Cumul entre la responsabilité pour dommages intermédiaires et la garantie de parfait achèvement

Avec l’entrée en vigueur de la loi du 4 janvier 1978, la question s’est posée de savoir si la responsabilité contractuelle pour dommages intermédiaires n’était pas incompatible avec la nouvelle garantie de parfait achèvement instaurée par l’article 1792-6, alinéa 2, du Code Civil.

En effet, s’agissant de la responsabilité décennale ou de la garantie de bon fonctionnement, la Cour de Cassation a clairement affirmé le caractère exclusif de ces garanties qui ne peuvent se cumuler avec la responsabilité contractuelle de droit commun et notamment la garantie des dommages intermédiaires.

Cependant, il en a été décidé autrement pour la garantie de parfait achèvement puisque les juges considèrent que son champ d’application est différent de celui de la garantie des dommages intermédiaires.

Ainsi, la garantie de parfait achèvement concerne les défauts de conformité apparents au moment de la réception des travaux, sans qu’il soit nécessaire d’apporter la preuve d’une faute de l’entrepreneur à la différence de la garantie des dommages intermédiaires.

Cette distinction est importante car la prescription de ces deux garanties est totalement différente comme nous le verrons un peu plus loin.

Mise en œuvre de la garantie des dommages intermédiaires

Elle nécessite d’apporter la preuve d’une faute du constructeur en raison, le plus souvent, d’un manquement à son obligation de conseil, de compétence ou de précaution.

Il faut, par exemple :

Démontrer que les fissurations non-infiltrantes du pavillon sont dues à une faute de conception ou à un manquement de l’entrepreneur à son devoir de conseil et de compétence vis-à-vis de son client, en ayant choisi un procédé inadéquat qu’il a mis en œuvre sans respecter les prescriptions du DTU.

Démontrer que le mauvais fonctionnement d’une installation de chauffage est dû à la mauvaise évaluation des besoins par l’entreprise de plomberie. Dans cette affaire, la responsabilité de l’entrepreneur a été retenue en raison du non-respect des prescriptions de Gaz de France en termes de rapport entre la puissance de la chaudière et le nombre d’équipements sanitaires pouvant être installé.

Responsabilité de l’entrepreneur du fait de son sous- traitant

Lorsqu’il a recours à un sous-traitant, l’entrepreneur répond, vis-à-vis du maître de l’ouvrage, de la bonne exécution des travaux sous-traités.

A ainsi été retenue la responsabilité contractuelle d’un entrepreneur principal pour des dommages intermédiaires causés par la faute de son sous-traitant qui avait mal exécuté la mise en place de fers et le coulage du béton, provoquant ainsi des fissurations dans la construction.

Prescription de la garantie des dommages intermédiaires

Cette garantie étant une construction des tribunaux, son délai de prescription n’est pas prévu par le Code Civil. Il est donc nécessaire de se référer aux décisions de la Cour de Cassation.
Pour les affaires jugées selon la législation antérieure à la Loi du 04 janvier 1978, les Juges de la Cour de Cassation ont jugé que la réparation de la faute contractuelle pour dommages intermédiaires est soumise à 10 ans à compter de la réception des travaux (et non au délai normal de prescription de l’action contractuelle, à savoir 30 ans à compter de la révélation du désordre).

Pour les affaires jugées selon les dispositions de la loi SPINETTA, la question ne s’est pas posée quant au délai de prescription à appliquer. Cependant, la tendance actuelle est d’harmoniser les délais de prescription et tout porte à croire qu’elle demeure prescrite au bout de 10 ans.

Quelle est la couverture par les assurances de la garantie des dommages intermédiaires ?

Selon la législation antérieure à la loi du 04 janvier 1978, la Cour de Cassation avait décidé que la clause d’une police couvrant ‘’Les dommages pour désordres des gros ouvrages quand la charge en incombe à l’assuré en vertu des articles 1792 et 2270 du Code Civil’’, engageait l’assureur à réparer tous les vices cachés affectant cet ouvrage, y compris les dommages intermédiaires.

Cette jurisprudence s’expliquait par les termes très généraux de l’article 2270 du Code Civil qui permettait de faire entrer les dommages intermédiaires dans son champ d’application.

Or depuis l’entrée en vigueur de la loi du 04 janvier 1978, la nouvelle rédaction de cet article interdit une telle extension puisque sont désormais expressément visées les seules responsabilités et garanties des articles 1792 à 1792-4 du Code Civil.

Dès lors, la clause d’une police d’assurances qui se réfère à l’article 2270 du Code Civil n’entraîne plus la couverture des dommages intermédiaires.

De tels désordres, qui ne relèvent pas de l’assurance de responsabilité obligatoire instituée par la loi de 1978, doivent donc faire l’objet d’une garantie spécifique.

Les dommages intermédiaires, conclusion

D’une part, la garantie des vices intermédiaires, méconnue des entrepreneurs, permet d’engager leur responsabilité alors même que le désordre n’est pas de nature décennale, ni lié au bon fonctionnement.
La faute étant souvent due à un manquement à son devoir de conseil, il est donc extrêmement important de conserver la preuve écrite que le client a été parfaitement informé sur les travaux exécutés.

D’autre part, le risque pour les entreprises du Bâtiment se situe surtout dans la non-couverture par leur assurance de cette garantie. En effet, celle-ci ne relevant pas de l’assurance obligatoire, elle ne figure pas systématiquement dans les contrats, il est donc impératif de faire le point avec son assureur. 

La garantie de parfait achèvement

Création de la loi du 4 janvier 1978 dite loi « SPINETTA », la garantie de parfait achèvement prévue par l’article 1792-6 alinéa 2 et suivants du code civil est la conséquence de la suppression de la réception provisoire qui préexistait avant la refonte du régime de responsabilité des constructeurs.

But de la garantie.

La garantie de parfait achèvement concerne la réparation des désordres qui ont fait l’objet, soit de réserves de la part du maître de l’ouvrage (le client) lors de l’établissement du procès verbal de réception des travaux, soit d’une notification écrite dans un délai déterminé.

Qui est tenu à la garantie et pendant quelle durée ?

La garantie de parfait achèvement n’est due que par l’entrepreneur et ce pendant une durée d’un an à compter de la réception des travaux.

Est-il possible d’y déroger ?

Avant le 1er décembre 1991, date d’entrée en vigueur de la loi n° 90-1129 du 19 décembre 1990 relative au contrat de construction de maison individuelle, il était possible de prévoir contractuellement une durée inférieure (ex : un mois) cette disposition n’étant pas d’ordre public. Depuis cette date, l’article 1792-6 du Code civil prévoyant la garantie de parfait achèvement figure désormais parmi les textes auxquels il ne peut être dérogé, la durée de garantie ne peut être inférieure à un an.

Quels sont les défauts couverts par la garantie ?

Les désordres réparés au titre de la garantie de parfait achèvement sont ceux qui ont été signalés par le maître de l’ouvrage et notamment les vices et défauts de conformité apparents qui ont fait l’objet de réserves sur le procès verbal de réception de travaux.
Un défaut de conformité apparent est un défaut dont le maître d’ouvrage a pu se rendre compte seul, sans le recours d’une personne extérieure (ex : maître d’oeuvre). Le caractère apparent doit donc s’apprécier en fonction des compétences techniques du maître d’ouvrage selon le corps d’état concerné.
La garantie ne s’étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l’usure normale ou de l’usage de l’ouvrage. 

Quelle garantie pour les désordres ayant fait l’objet de réserves à la réception ?

Les désordres faisant l’objet de réserves lors de réception des travaux sont couverts par la garantie de parfait achèvement et non par la garantie décennale, sauf en cas d’aggravation des désordres.
Exemple : une entreprise réalise des enduits. Lors de la réception, le maître d’ouvrage émet des réserves à propos de l’apparition de fissures. Si les fissures ne sont pas infiltrantes et constituent un désordre purement esthétique, il sera fait application de la garantie de parfait achèvement. Par contre, si elles se révèlent infiltrantes et risquent de rendre l’ouvrage impropre à sa destination, les conditions sont remplies pour que soit fait application de la garantie décennale.

Quelle garantie pour les désordres apparus après la réception ?

Les désordres sont ceux ayant fait l’objet d’une notification écrite de la part du maître d’ouvrage à l’entrepreneur dans l’année suivant la date de réception des travaux.
Suivant la nature du désordre, il pourra être invoquée la garantie de parfait achèvement (ex : désordre d’ordre esthétique), la garantie de bon fonctionnement s’il s’agit d’un élément d’équipement dissociable ou de la garantie décennale si les désordres sont d’une telle gravité que l’ouvrage risque de ne plus pouvoir être utilisé conformément à l’usage pour lequel il a été prévu.

Délais pour agir.

Il ne suffit pas seulement pour le maître d’ouvrage d’émettre des réserves lors de la réception, il doit apporter la preuve qu’il a mis tout en œuvre auprès de l’entrepreneur pour que les travaux de reprise soient exécutés.
Le simple envoi d’une lettre recommandée à l’entrepreneur ne suffit pas à justifier la mise en oeuvre de la garantie de parfait achèvement. Le maître de l’ouvrage en cas de carence de l’entrepreneur saisir le tribunal compétent pour suspendre le délai de prescription d’une année. S’il ne le fait pas, il ne pourra pas obtenir réparation sauf à démontrer la faute de l’entrepreneur et passer ainsi sur le terrain des dommages intermédiaires qui échappent à la prescription d’un an.

Quelles sont les conséquences en terme de prise en charge par l’assurance ?

Les conséquences peuvent être importantes puisque la garantie de parfait achèvement relève de la responsabilité contractuelle et n’est pas couverte par les polices d’assurance, contrairement à la responsabilité décennale qui fait l’objet d’une obligation d’assurance. Les travaux de reprise resteront donc à la charge de l’entrepreneur ce qui peut représenter un coût important.

L’exécution des travaux de reprise.

Il n’existe pas de règles précises en la matière. Cependant, il est indispensable de consigner par écrit la liste des travaux qui devront être exécutés, les délais à respecter et une fois ceux-ci réalisés faire signer un constat de levée de réserves.
En l’absence d’accord entre les parties ou en cas de non-respect des délais convenus et après mise en demeure restée sans réponse, les travaux de réfection peuvent être effectués, aux frais et risques de l’entrepreneur défaillant.

En cas de refus du client de lever les réserves malgré la réalisation des travaux, il est conseillé de le faire constater judiciairement.

Marchés publics

La garantie de parfait achèvement existe aussi dans ce type de marché et elle est prévue à l’article 44-1 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) tel qu’il est prévu par le décret du 21 janvier 1976 dans l’attente d’un nouveau CCAG conforme aux dispositions du nouveau code des marchés publics.

Elle est d’une durée de 1 an sauf stipulation différente à compter de la réception de travaux ou de 6 mois à compter de cette date si le marché ne concerne que des travaux d’entretien ou des terrassements.
Dans le cadre des marchés publics, l’obligation de parfait achèvement est beaucoup plus précise puisque l’entrepreneur doit :

– exécuter les travaux et prestations éventuels de finition ou de reprise objet des réserves figurant sur le procès verbal de réception des travaux ;
– remédier à tous les désordres signalés par le maître de l’ouvrage ou le maître d’œuvre, de telle sorte que l’ouvrage soit conforme à l’état où il était lors de la réception ou après correction des imperfections constatées lors de celle-ci ;
– procéder, le cas échéant, aux travaux confortatifs ou modificatifs dont la nécessité serait apparue à l’issue des épreuves effectuées conformément au CCAP ;
– remettre au maître d’œuvre les plans des ouvrages conformes à l’exécution.

Conclusion

Très souvent ignorée car totalement éclipsée par la garantie décennale, la garantie de parfait d’achèvement n’en demeure pas moins l’une des spécificités du régime de responsabilité des constructeurs d’ouvrage de Bâtiment.
Elle constitue une sorte de « service après-vente » d’une durée d’un an pour les désordres dont la gravité ne remet pas en cause la pérennité de l’ouvrage.

Cependant, même si ces désordres sont de faible importance et souvent de nature esthétique, ils peuvent avoir de lourdes conséquences pour l’entrepreneur. 

Si un vice caché affecte vos travaux après leur réception par votre client, vous êtes tenu de trois garanties : parfait achèvement (un an), bon fonctionnement (deux ans), décennale (dix ans).

La réception est donc une étape essentielle !

Il est primordial de faire signer au client un procès-verbal de réception. Avant de faire jouer vos garanties, votre assureur décennal vous demandera toujours de justifier de la réception de vos travaux par le client.

Pour engager la responsabilité décennale d’une entreprise, le dommage doit soit porter atteinte à la solidité de l’ouvrage, soit le rendre impropre à sa destination. La solidité peut être constatée de manière objective par une expertise. L’impropriété à destination est une notion plus subjective qui dépend chaque fois des circonstances.

Que faire pour s’exonérer de sa responsabilité décennale ?

La loi prévoit trois possibilités, mais elles sont rarement retenues par les tribunaux.

1. La force majeure : c’est-à-dire la survenance d’un événement extérieur à l’entreprise qu’il lui était impossible de prévoir (une tempête n’est pas un cas de force majeure, ni même la sécheresse, pas plus qu’une crue centennale).

2. Le fait d’un tiers (destruction du bâtiment par un incendie criminel, par exemple).

3. La faute du maître d’ouvrage : Plusieurs conditions doivent être réunies par l’entreprise. Il lui faudra prouver que le maître d’ouvrage est compétent en matière de construction et qu’il s’est immiscé fautivement dans la construction. Autant dire que le cas est rare. 

Ne négligez pas les réserves !

Si vous estimez que le client veut vous imposer une solution technique dangereuse, ou s’il refuse le temps de séchage de vos travaux… vous devez l’informer du risque qu’il prend en émettant des réserves.

Pour être retenues, les réserves doivent comporter quatre éléments : 

  • Indiquer pour quelle raison la solution retenue ou les travaux sont inadaptés
  • Quelles en seraient les conséquences (décrire le sinistre probable)
  • Proposer la solution technique alternative adaptée, la plus proche de ses attentes (la décrire)
  • Indiquer le coût.

Faites les par écrit et pensez à en garder la preuve (lettre recommandée avec accusé de réception). 

C’est un sujet qui revient souvent dans l’abondante jurisprudence sur les litiges liés à la responsabilité décennale : l’inadéquation entre activité réalisée par le constructeur et activité effectivement garantie par l’assureur.

Comme toute assurance, l’assurance de responsabilité décennale coûte cher et nécessite une procédure dont l’entrepreneur se passerait bien. D’autant plus que de très nombreuses années peuvent s’écouler avant d’avoir besoin de faire appel à son assureur pour un sinistre de nature décennale. L’impression de perte d’argent et de temps conduit ainsi parfois l’assuré à ne plus contrôler les conditions de son contrat et sa concordance avec son métier. Et ce malgré les relances de l’assureur à chaque échéance annuelle.

Grave erreur ! Une activité non déclarée au contrat n’est tout simplement pas couverte. C’est à dire qu’en cas de sinistre, l’assureur ne prendra en charge aucun frais de réparation des dommages réclamés par le propriétaire de l’ouvrage. Les dommages de nature décennale étant toujours d’une certaine gravité, le risque est donc grand de mettre en difficulté toute l’économie de son entreprise pour un seul sinistre.

Notre préconisation : vérifier chaque année les activités déclarées

Pour être sûr que le contrat d’assurance couvre bien toutes les activités réalisées, il est donc fortement conseillé de contrôler à chaque échéance annuelle les différentes activités assurées. Ces activités sont normalement indiquées sur l’avis d’échéance envoyé obligatoirement par l’assureur au moins deux mois avant la date d’échéance. Elles comprennent les techniques et procédés de construction que l’artisan peut utiliser pour réaliser son ouvrage. A contrario, si une technique utilisée par l’artisan n’est pas indiquée sur ce document ou sur les conditions particulières du contrat, il y a de fortes chances qu’elle ne soit pas couverte. C’est notamment le cas pour les procédés techniques novateurs qui n’ont pas encore été « évalués » par les assureurs.

En plus de ce contrôle annuel, il est fondamental de déclarer en cours d’année à l’assureur tout nouveau procédé technique employé. Si ce dernier ne rentre pas dans le cadre des activités garanties par le contrat, la signature d’un avenant est nécessaire, sous peine d’absence de garantie en cas de sinistre sur un ouvrage réalisé à l’aide ce nouveau procédé technique.

Un document de contrôle utile : la nomenclature des activités du BTP

Pour aider les assureurs et entrepreneurs du BTP à déterminer le périmètre à assurer, la Fédération Française de l’Assurance publie et met à jour régulièrement la nomenclature des activités du BTP. Cette nomenclature, profondément révisée au printemps 2019, répertorie avec précision les activités pratiquées par les professionnels du bâtiment.

Chaque activité (couverture, plomberie, piscines, photovoltaïque, étanchéité de toiture…) est détaillée et comprend à la fois les travaux de conception et de réalisation, ainsi que les travaux accessoires inhérents à l’activité principale. Exemple : l’activité annexe « VRD » est comprise dans l’activité principale « travaux de maçonnerie ».

À l’aide ce document, l’assureur doit pouvoir déterminer exactement les activités à garantir et l’entrepreneur doit pouvoir contrôler si certaines de ses activités n’ont pas été omises par l’assureur. 

Attention il n’est pas rare que la compagnie qui vous assure introduise des variantes et ce notamment en incluant des exclusions, voici quelques exemples :

  • Maçonnerie, exclusion de la démolition
  • Bardage, exclusion du bardage horizontal
  • Charpente bois, exclusion des ossatures bois même de moins de 20m2, exclusion des traitement curatifs…
  • Etanchéité toiture terrasse, limitation de surface, exclusion de la résine
  • Carrelage, exclusion des sols coulés ou limitation de surface
  • Plomberie-chauffage, exclusion de la maintenance de chaudières que vous n’avez pas installer

Nous vous conseillons de bien lire la nomenclature des activités associées à votre contrat.

Si chacun connaît la célèbre maxime « Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer » qui, en revanche, pense également à la prudence requise en toutes circonstances ?

A l’heure de la révolution numérique et de la concurrence à tout va l’entrepreneur est partout et doit répondre à tous : ses clients comptent sur sa réactivité, ses compétences techniques et son professionnalisme. Il est donc plus que jamais indispensable d’attirer l’attention du chef d’entreprise sur l’étendue tentaculaire de son devoir de conseil, étendue dont il y a fort à parier qu’il en ignore les limites… Se cantonner au respect des seules obligations découlant du contrat signé est prendre de très grands risques pouvant, le cas échéant, se traduire en procédure judiciaire, expertise, condamnation à indemnisation… avec tous les risques que cela comporte pour la trésorerie et la pérennité de l’entreprise.

Qu’est-ce que le devoir de conseil ?

Le principe ancien, repris dans la réforme du droit des contrats issue de l’ordonnance du 10 février 2016 ratifiée par la loi du 20 avril 2018 et plus précisément dans l’article 1194 du Code civil qui dispose : « Les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l’équité, l’usage ou la loi. »

« L’équité, l’usage ou la loi » : ces termes sont restés et traduisent la permanence du principe : tout professionnel – du terrassier au maître d’œuvre – est tenu avant réception à un devoir de conseil que le chef d’entreprise ferait bien de toujours avoir à l’esprit s’il veut éviter de graves déboires.

Il n’est pas excessif de parler de véritable « permanente obligation de conseil » dont la violation est susceptible d’engager sa responsabilité, par exemple dans les cas suivants tirés de situations réelles :

  • du défaut de conseil quant au caractère inondable du terrain et ses conséquences sur l’habitabilité de la construction projetée ;
  • de l’obligation d’informer le maître de l’ouvrage sur les conséquences des travaux envisagés ;
  • de l’obligation d’informer le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre de la présence de mérule détectée lors des travaux ;
  • de l’obligation d’informer les intervenants le précédant et le maître d’œuvre des contraintes des matériaux qu’il lui est demandé de mettre en œuvre ;
  • de l’obligation d’analyser les contraintes urbanistiques, particulièrement en l’absence de maître d’œuvre et de plans d’implantation ;
  • de l’obligation de conseil sur la réglementation applicable ;
  • de l’obligation de contrôler les quantités au regard des plans et contraintes du projet ;
  • du risque lié à une reprise partielle des fondations ;
  • de l’obligation de conseil renforcé en l’absence de maîtrise d’œuvre ;
  • de l’obligation de conseil portant sur les prestations réalisées par le maître de l’ouvrage lui-même ;
  • du devoir de contrôle de l’état de l’existant et de formulation de réserves si nécessaire ;
  • du devoir de critiquer le support de son intervention s’il l’estime déficient ;
  • du défaut de mise en garde des conséquences de la modification du programme initial ;
  • du conseil sur les matériaux à mettre en œuvre et la nécessité de compléter le programme envisagé ; 
  • de l’obligation d’informer le maître de l’ouvrage des risques présentés par les travaux envisagés au regard de l’état de l’existant ;
  • de l’implantation de l’ouvrage ;
  • du défaut d’avertissement sur les risques de nuisances au tiers à raison de l’installation d’un extracteur d’air sur le toit de l’immeuble;
  • du défaut de proposition d’adaptation du projet en considération d’inondation survenue en cours de chantier ;
  • de l’absence de conseil quant aux conditions d’utilisation et de maintenance après réception.
  • A la lecture de ces exemples tirés de cas réels nul doute que chacun pensera évidemment à des cas le concernant !

Risques de condamnation

La Cour de cassation va encore plus loin puisqu’elle admet également la condamnation du professionnel pour manquement à son devoir de critique, par exemple au sujet de :

  • la nécessité de recourir à un maître d’œuvre ;
  • la nécessité d’un permis de construire ou de son respect ;
  • l’insuffisance des travaux envisagés ou des matériaux choisis ;
  • du nécessaire devoir de critique des plans ou des matériaux qui lui ont été fournis par le maître de l’ouvrage ;
  • des choix de la maîtrise d’œuvre ou des constatations de l’expert judiciaire servant de base aux travaux de reprise (on peut toutefois s’interroger ici sur la pertinence de cette extension de responsabilité alors qu’un expert judiciaire faisant autorité a été désigné pour préconiser des solutions réparatoires…) ;
  • du devoir de refuser l’exécution de travaux non conformes et dangereux ;
  • critique du support réalisé par un autre colocataire, mais non de procéder à des sondages destructifs pour vérifier l’existence de l’étanchéité ou encore obligation de souligner les risques liés à l’absence de traitement préalable du support ;
  • de la nécessité d’analyser l’existant et devoir d’adaptation et de critiques du projet envisagé s’il y a lieu ;
  • de l’obligation d’avertir le maître de l’ouvrage, pourtant titulaire d’un CAP en bâtiment, des risques induits par l’interruption du chantier pendant de nombreux mois ;
  • de l’obligation d’avertir le maître de l’ouvrage des risques induits par l’absence de relevé topographique. (*)

On le voit, les décisions prononcées par les magistrats ne laissent plus qu’une seule place à l’irresponsabilité de l’entrepreneur : la véritable cause étrangère qui ne lui aurait pas permis de parvenir à l’obligation de résultat à laquelle il est tenu.

« L’entrepreneur sera bien avisé de toujours laisser des traces écrites »

Comme en matière de responsabilité décennale, la jurisprudence française renforce sans cesse la protection du maître d’ouvrage, a priori profane et bien souvent en situation d’infériorité économique face à l’entreprise prestataire.

Dans cette mesure, l’entrepreneur sera bien avisé de toujours laisser des traces écrites destinées à prouver si besoin qu’il a bien exercé son devoir de conseil et ne saurait être tenu pour responsable des dommages ultérieurement survenus. Confirmer les points essentiels d’une conversation par un écrit rapide auprès du maître d’ouvrage ou des sous- traitants est une habitude à prendre : elle permettra d’éviter bien des difficultés à l’entreprise et même plus : temps perdu, frais de justice, stress… Autant d’énergie et de chiffre d’affaires envolés bien inutilement !